Initiation à l’Eglise orthodoxe et à sa vie – niveau 2 (G. Lusseaud)

CATÉCHÈSE ORTHODOXE

Georges LUSSEAUD, prêtre

INTRODUCTION

PROLOGUE

DIEU, LUMIÈRE DE NOTRE VIE

LE CHRIST, SIGNIFICATION DE NOTRE VIE

LES SEPT CLÉS DE LA VIE SPIRITUELLE

L’EGLISE

PRÉLUDE À L’INITIATION LITURGIQUE

ÉPILOGUE

TABLE DES MATIÈRES

INTRODUCTION

PROLOGUE

DIEU, LUMIÈRE DE NOTRE VIE

1 – Croire Dieu pour le connaître

2 – La révélation trinitaire éclaire toute la vie

3 – Comment Dieu s’est-Il révélé Trinité

4 – Le mystère est l’étoffe de notre vie

5 – Inconnaissable et connaissable

LE CHRIST, SIGNIFICATION DE NOTRE VIE

6 – L’homme devant la Vérité faite homme

7 – Le Christ équilibre de notre vie

8 – Des hérésies au dogme de Chalcédoine, en 451

9 – Des hérésies au dogme de Chalcédoine, en 451 (suite)

LES SEPT CLÉS DE LA VIE SPIRITUELLE

10 – La virginité de Marie, Mère de Dieu

11 – Les anges

12 – Ciel, terre et enfer

13 – La prière

14 – Les saints

15 – Les icones

16 – Les sacrements

L’ÉGLISE

17 – L’Eglise, Mère des vivants

18 – Unité dans la diversité

19 – Le mystère de la lumière et du sel

PRÉLUDE A L’INITIATION LITURGIQUE

20 – Vous entrez dans l’église

21 – Debout ! Soyons attentifs ! En silence !

22 – La synaxe des catéchumènes

23 – Le mystère eucharistique

24 – Le cycle liturgique

EPILOGUE

HYMNE A SAINT DENYS

INTRODUCTION

Cette Catéchèse orthodoxe, rédigée initialement par le Père Georges Lusseaud, a été légèrement remaniée en vue d’une nouvelle impression. Elle correspond au besoin toujours brûlant d’instruction. Nous sommes généralement ignorants à l’égard du christianisme ou bien nous croyons savoir et nous ne savons pas.

Or la foi chrétienne s’approfondit par l’acquisition du Saint-Esprit et par l’étude de l’enseignement du Christ, Verbe incarné. Qui est le Christ ? Qu’est-ce que l’Eglise ? Quand le Christ a-t-Il dit qu’il fallait baptiser ? Quelle est l’origine de tel autre sacrement ? Qu’est-ce que la Résurrection ? « Quittez l’ignorance et vous vivrez » enseigne la Sainte Liturgie.

Nous ne pouvons pas prétendre au nom béni de chrétien et ignorer plus longtemps ce que Dieu veut, ce qui Lui plaît ou Lui déplaît, ce qu’Il attend de nous, et ce que nous pouvons attendre de Lui. Nous ne pouvons pas parler de « Peuple royal et sacerdotal » si les laïcs que l’on désigne ainsi sont ignorants. L’ignorance produit la damnation cléricale de la hiérarchie et la passivité des fidèles.

Certes, une catéchèse comme celle-ci ne peut prétendre répondre à toutes les questions.

Mais elle est un instrument de travail, de réflexion et d’édification fraternelle, parmi d’autres ouvrages maintenant disponibles en langue française.

Puisse cette publication encourager dans leur zèle pastoral nos prêtres et nos diacres, si soucieux d’enseigner la vérité et de promouvoir chez les fidèles à eux confiés l’amour de la vivifiante Tradition et un véritable esprit d’Eglise.

Et que le Christ Lumière du monde éclaire nos intelligences et nos cœurs.

Père Marc-Antoine Costa de Beauregard

PROLOGUE

Un être humain né en France, a fortiori baptisé (dans le contexte de l’Eglise romaine ou protestant, peu importe), ne « se convertit » pas à l’Orthodoxie : il y revient. Il n' »entre » pas dans l’Eglise orthodoxe : il y retourne. Car l’Eglise orthodoxe fut notre seule et unique Eglise catholique pendant mille ans, et elle est notre Mère-Eglise.

Il s’agit donc, de l’Eglise à vous : de restitution de la foi. Et, de vous à l’Eglise : de réintégration.

Mais on ne revient pas à l’Eglise orthodoxe n’importe comment.

Où que vous alliez, sachez où vous mettez les pieds. Nous supposons qu’il ne vous est jamais arrivé d’aller dans une gare et d’y demander un billet sans pouvoir préciser, à l’employé du guichet, pour quel train, autrement dit pour quelle destination vous demandez l’achat de ce billet ? Eh bien, rejoindre l’Orthodoxie sans commencer par l’étude doctrinale, ce serait un peu ça…

Mais il y aurait encore pire. Invité à déjeuner chez des amis, et leur apportant une belle tarte pour le dessert, vous viendrait-il à l’idée d’offrir un gâteau empoisonné ? Eh bien, s’introduire comme « fidèle » dans l’Eglise orthodoxe en gardant dans le cœur des pensées hérétiques, ce serait un peu ça…

Quelles que soient vos idées au moment où vous venez, sachez une fois pour toutes que vous valez infiniment plus, infiniment mieux que ces idées. Le monde postmoderne, ce XXème siècle finissant, est un monde hyper-psychique, asphyxiant pour l’esprit et pour le cœur, dispensateur d’asphyxie : rationalisme, progressisme, freudo-marxisme, faux-ésotérisme, etc.

Vivre, c’est choisir. Revenir à l’Orthodoxie, c’est avoir choisi la Vérité. Ce choix fait, on ne recule plus.

« La Vérité », disait le saint évêque Irénée de Lyon (IIème siècle), « La Vérité rajeunit le vase qui la contient« . Notez bien que ce n’est pas le vase qui rajeunit la Vérité, mais tout le contraire :

la Vérité rajeunit son contenant, autrement dit le vase.

Quant aux réalités spirituelles, le monde postmoderne ne sait rien, car il a tout perdu ; sa vieillesse vient de là et, souventes fois, nos frères chrétiens hétérodoxes se trompent en prenant cette vieillesse pour de la jeunesse et en essayant de convertir l’Eglise au monde.

Avec son dogme immuable, sa liturgie qui n’est jamais « démodée », sa tradition vivante qui dépasse toute philosophie, l’Eglise de Dieu, catholique orthodoxe est en-avant de l’histoire.

Il ne s’agit pas pour les croyants de rattraper un coche il s’agit pour eux de tracer cette route de l’en-avant, par où devra passer le coche

Et quand, pour se vouloir « actuel », un fleuve se coupe de sa source, il n’y a plus de courant d’eau, et donc il n’y a plus de fleuve, mais un ruisseau qui se dessèche en mare. Or on trouve les sources sur les sommets.

Autre image : la coupe est haute ? Alors, il faut monter quand on veut y boire.

Cela dit, que Dieu vous soit en aide.

« Dans ce monde c’est la lumière naturelle qui est à l’image de la lumière divine.

Ainsi la vision des objets n’est possible qu’à la lumière; celle-ci est-elle faible l’œil distingue à peine les objets, il les voit mieux à une lumière plus forte et enfin à la pleine lumière du soleil il parvient à une certaine perfection dans la vision. Il en est de même dans le monde spirituel, où toute vision authentique n’est possible qu’à la lumière divine et où celle-ci varie selon que Dieu la donne avec plus ou moins d’abondance. La foi est lumière, mais faible, et l’espérance est lumière, mais encore imparfaite : mais c’est dans la plénitude de l’Amour que la lumière atteint sa perfection. »

Hiéromoine Sophrony du Mont Athos en 1952

DIEU, LUMIÈRE DE NOTRE VIE

1 – Croire Dieu pour le connaître.

2 – La révélation trinitaire éclaire toute la vie.

3 – Comment Dieu s’est-Il révélé Trinité ?

4 – Le mystère est l’étoffe de notre vie.

5 – Inconnaissable et connaissable.

« Il est impossible de vivre sans la vie. Or l’existence de la vie provient de la participation à Dieu.

« Participer à Dieu, c’est le connaître et jouir de sa bonté. »

Le saint évêque Irénée de Lyon, martyr en 202

« Je n’ai pas commencé de penser à l’Unité que la Trinité me baigne dans sa splendeur. Je n’ai pas commencé de penser à la Trinité que l’Unité me ressaisit.

« Lorsqu’Un des Trois se présente à moi, je pense que c’est le tout, tant mon œil est rempli, tant le surplus m’échappe. Car dans mon esprit trop borné pour comprendre un seul, il ne reste plus de place à donner au surplus.

« Lorsque j’unis les Trois dans une même pensée, je vois un seul flambeau sans pouvoir diviser ni analyser la lumière unifiée ». Le saint évêque Grégoire de Nazianze, 328-390

1 – Croire Dieu pour le connaître.

Il n’y a pas plus de preuves de l’existence de Dieu qu’il n’y a de preuves de notre propre existence. S’il pouvait y en avoir, ce seraient les mêmes. L’évidence nous dispense du raisonnement et de la preuve. Une chose est évidente quand on la connaît du fait qu’on est en train de la vivre.

Oui ou non, existons-nous et vivons-nous ?

Nous existons et nous vivons : sans quoi nous ne serions pas là à nous poser des questions. Le constater, pour une intelligence normale, c’est déjà se référer à Dieu. Il n’y a pas plus d’athées qu’il n’y a d’hommes sans âme et sans esprit. Un athée, en fait, ça n’existe pas. Ce qui existe, c’est la réaction de dégoût des gens honnêtes à qui l’on a mal parlé de Dieu. Au nom du Dieu vrai, dont ils gardent l’intuition et souvent aussi l’amour, ils chassent de leur esprit, par respect du vrai, les fausses images de Dieu qu’une Eglise falsifiée leur a trop longtemps présentées comme vraies. Ils disent, par dépit, qu’il n’y a pas de Dieu.

Par lassitude ou par désespoir, ils s’enlisent dans cette position négative. Qu’est-ce qu’un croyant ? Un homme qui a pensé : Dieu n’aurait-il pas quelque chose à nous dire ? Croire, c’est beaucoup moins croire « en » Dieu que croire Dieu qui dit quelque chose à l’homme. Il faut savoir se taire pour entendre parler Dieu. Et aussi pour entendre, au fond de nous, notre désir d’entendre parler Dieu.

L’Eglise existe. Elle s’offre à nous comme le lieu où Dieu parle à l’homme et où l’homme parle à Dieu.

Ainsi, l’Eglise réalise ce bain de vie où l’on se voit assuré de vivre normalement. Si nous déambulions à quatre pattes, l’Eglise ne serait pas pour nous. Nous sommes tous « d’Eglise » du fait que nous ne sommes pas des animaux. L’Eglise, c’est la vie humaine en tant qu’elle tient debout.

Mais gardons-nous de prendre l’Eglise pour quelque chose de subtil qui planerait au-dessus de nos têtes. Elle touche le sol et s’y enfonce. Elle touche tous les évènements de notre vie et s’y enfonce. L’Eglise dessine comme un croix : une barre verticale, une barre horizontale.

La barre verticale : nous tenons debout ; notre verticalité signifie que nous sommes faits pour un mouvement de tout l’être vers Dieu. Barre horizontale : nous appartenons au monde matériel, nous en faisons partie; nous nous trouvons engagés dans un autre mouvement avec le pain à gagner, des enfants à élever, une société humaine accaparante aux très multiples secteurs, etc.

L’Eglise, ce n’est pas l’un sans l’autre; ni l’un contre l’autre ; ni même l’un qui pourrait un peu faire oublier l’autre. C’est l’un et l’autre, et ça ne fait qu’un. Pourquoi ?

Parce que Dieu qui nous parle S’est incarné. Il s’est fait homme comme nous et, devenu homme, Il a pris nom : Jésus Christ. Il est né, Il a vécu la vie humaine, Il est mort, Il est descendu aux enfers, Il est ressuscité trois jours après sa mort, Il est monté aux cieux.

Comment le savons-nous ?

Avant de ne plus être visiblement parmi nous comme Il le fut pendant trente-trois ans, Il a choisi des disciples et, parmi eux, douze témoins appelés Apôtres. Avec eux, Il a fondé son Eglise.

L’Eglise continue l’Incarnation de Dieu par la transmission du témoignage donné par les Apôtres, témoins directs.

Voilà pourquoi l’Eglise existe.

Quel enseignement du Christ les Apôtres ont-ils transmis ?

D’abord, QUI est Dieu : Il est Trinité, Un en Trois Personnes, Père et Fils et Saint Esprit. Le FILS s’incarne du Saint Esprit et de Marie la Vierge, créature toute pure et pleine de la connaissance de Dieu, la Mère de Dieu.

Ensuite, CE QUE FAIT Dieu : Il nous libère de l’état catastrophique où l’humanité s’enfonça en tournant le dos à Dieu. Il nous donne tous les moyens de devenir des enfants du Père, des fils adoptifs par grâce divine, c’est à dire nous-mêmes des dieux. C’est la foi. Ce sont les sacrements, à commencer par le baptême.

Enfin, LE SAINT ESPRIT reste présent, vigilant, agissant : Il préserve l’Eglise de l’erreur et de la dégradation, Il la rajeunit à chaque instant et, à chaque instant par Lui nous pouvons boire à la source divine elle-même.

Voilà pourquoi l’Eglise s’offre à nous comme le lieu où Dieu parle à l’homme et où l’homme parle à Dieu.

Dieu parle. Et Dieu a institué, par l’Eglise, le moyen d’être entendu de tous. Dieu agit pour soutenir sa créature humaine tout en respectant pleinement sa liberté. Et Dieu a institué, par l’Eglise, le moyen d’être AU SERVICE de tous ceux qui Le cherchent. L’Eglise, c’est la Trinité divine qui se communique à nous.

Dieu ne ment pas. Dieu n’agit pas en vain. Il s’agit de savoir si l’on veut répondre à l’appel de Dieu en décidant, une fois pour toutes, de croire Dieu.

DIEU PARLE À L’HOMME : trois textes des Saintes Ecritures (Genèse et Evangiles)

Livre de la Genèse, 18, 1-4

« Yahvé apparut à Abraham au Chêne de Membré, tandis qu’il était assis à l’entrée de la tente, au moment le plus chaud de la journée.

Ayant levé les yeux, voilà qu’il vit trois hommes qui se tenaient debout près de lui. Dès qu’il les vit, il courut de l’entrée de la tente à leur rencontre et se prosterne.

Il dit : – Seigneur, je T’en prie si j’ai trouvé grâce à tes yeux, veuille ne pas passer près de ton serviteur sans t’arrêter. »

Evangile selon saint Marc 9, 2-8

« Six jours après, Jésus prend avec Lui Pierre, Jacques et Jean, et Il les emmène seuls, à l’écart, sur une haute montagne.

« Là, Il fut transfiguré devant eux : ses vêtements devinrent resplendissants d’une telle blancheur qu’aucun foulon sur terre ne peut blanchir de la sorte. Elie leur apparut avec Moïse et tous deux s’entretenaient avec Jésus.

« Prenant la parole, Pierre dit à Jésus : Maître, il est heureux que nous soyons ici. Faisons donc trois tentes, une pour Toi, une pour Moïse, une pour Elie. « C’est qu’il ne savait que dire, car ils étaient saisis de frayeur. Et une nuée survint qui les prit sous son ombre, et de la nuée sortit une voix : « CELUI-CI EST MON FILS BIEN-AIMÉ. ÉCOUTEZ-LE !

« Soudain, regardant autour d’eux, ils ne virent plus personne, que Jésus seul avec eux.

Evangile selon saint Marc 1, 9-11

« En ce temps-là, Jésus vint de Nazareth de Galilée et Il fut baptisé par Jean dans le Jourdain. Au moment où II remontait de l’eau, Il vit les cieux se déchirer et, sous forme de colombe, l’ESPRIT descendre sur Lui. Et des cieux vint une voix : « TU ES MON FILS BIEN-AIMÉ. TU AS TOUTE MA FAVEUR. »

Liturgie de la Théophanie célébrant cet évènement. « Seigneur Saint, PÈRE Tout-Puissant et éternel, Tu nous révèles aujourd’hui que le « Christ né de la Vierge Marie et adoré par les Mages est ton FILS bien-aimé, créateur du monde. Il sauve la création par son baptême, manifestant au monde le mystère de la Triple-Unité : en effet, TA VOIX clame sur les eaux reconnaissant ton FILS, et ton ESPRIT, qui planait à l’origine sur les eaux de l’abîme, témoigne, sous forme de colombe, la divinité du Christ, et annonce par sa manifestation la restauration de la nature.

2 – La révélation trinitaire éclaire toute la vie.

Il est très important de savoir que l’homme a été créé à l’image de Dieu. Ne faut-il pas commencer par poser la question : QUI sommes-nous donc ? Toute notre vie ne va-t-elle pas dépendre de la réponse qui sera donnée ? Quand on sait que, tout au fond de nous, cette réponse est : tu es à L’IMAGE DE DIEU, toute notre vie ne va-t-elle pas dépendre de ce que Dieu, dont tout homme porte l’image, aura révélé DE LUI-MÊME ?

Chacun de nous s’appelle « JE ». Il y a là une vérité très forte et indéfinissable. Le mystère de l’unique. Chacun est absolument lui-même. Aucun être humain ne peut, cependant exister seul, ni même s’imaginer existant seul. Chaque « JE » se tourne vitalement vers les autres et dit « nous tous ». Il y a là encore une vérité très forte. Le mystère du multiple.

Or, livrés à ce que nous pouvons connaître par nous-mêmes, nous voilà en pleine contradiction. L’unique se dresse contre le multiple, et vice-versa. On veut être « JE » en se débarrassant du « NOUS TOUS »; le « NOUS TOUS » a tendance à effacer ou à écraser le « JE ». Aucune société humaine (uniquement humaine) ne parvient, par ses idées ou par ses philosophies successives, à réaliser la synthèse. C’est déchirant.

Si intelligent et généreux soit-il, l’homme ne peut suffire à résoudre un tel dilemme. Sans cette situation pourtant, toute signification définitive de nos deux aspirations fondamentales (je suis « moi » et « nous » sommes) nous échappe. Leur équilibre, qui seul pourrait nous assurer de vivre en paix, s’avère impossible. Toute notre vie s’en trouve perturbée, gâtée, à l’écart de l’harmonie et de l’amour.

C’est pourquoi, en se révélant TRINITÉ (Un seul Dieu en Trois Personnes), le créateur des mondes révèle l’homme à lui-même : homme, tu es UNE PERSONNE à l’image du Père et du Fils et du Saint Esprit ; hommes ensemble, vous êtes pour l’UNITÉ DANS LE MULTIPLE à l’image du Père et du Fils et du Saint Esprit.

Une PERSONNE : et non point seulement cet INDIVIDU qui, pour être « JE », s’oppose à tout autre que lui et au « nous tous » dont il ne peut pourtant pas se passer. Que veut dire : personne ?

Un être irremplaçable et unique, qui ne s’enferme pas dans sont « JE », mais se tourne vers les autres et leur dit : « TOI ». Un « JE » qui aide les autre à vivre. Ou, si vous voulez, qui les aide à dire « JE » dans la joie d’être « NOUS TOUS ».

Cela est indéfinissablement réalisé en Dieu : le Père « pose » le Fils et l’Esprit, le Fils « pose » le Père et l’Esprit, l’Esprit « pose » le Père et le Fils. Pas d’opposition dans l’amour parfait, mais au contraire chacun fait « être » l’autre et ainsi Père et Fils et Esprit sont UN.

Cette merveilleuse révélation trinitaire nous révèle la vraie société humaine : se poser les uns les autres, ne faire qu’un en étant multiples. C’est se qu’on appelle COMMUNIER.

Ainsi l’homme comprend qu’étant une personne, il se définit comme membre actif d’une COMMUNION.

Alors, enfin rétablie à L’IMAGE DE DIEU, la société humaine devient cette communion où tous les « JE » irremplaçables et uniques ne font qu’UN. Et c’est l’ÉGLISE. Reflet de Dieu-Trinité, l’Eglise exprime, par sa nature même, le sens total de notre nature.

Parlant donc par son Eglise, et parlant pour être entendu par les créatures auxquelles il s’adresse, Dieu inspire le SYMBOLE DES APÔTRES, ou résumé de la foi, rédigé aux deux conciles œcuméniques de Nicée et de Constantinople, en 325 et en 381.

Le Père est Dieu. Il n’a pas été créé, Il n’a pas commencé d’être, Il se tient hors du temps. Il est le Père, Il est Dieu et Il EST.

Le Fils (ou Verbe ou Parole) est Dieu. Incréé comme le Père, Dieu comme Lui, de même substance et nature, Il est éternellement engendré du Père. Il est le Fils, Il est Dieu, et Il EST.

Le Saint Esprit est Dieu. Incréé comme le Père et comme le Fils, Dieu comme le Père et comme le Fils, de même substance et nature qu’eux, Il procède éternellement du Père et de Lui seul. Il est l’Esprit,Il est Dieu, et Il EST.

En Dieu, le Père est donc le Monarque, ou la source de la vie divine : et cependant le Fils est égal au Père et à l’Esprit, l’Esprit est égal au Père et au Fils. Père, Fils et Saint Esprit sont UN SEUL Dieu.

La prière qui glorifie juste, ou prière orthodoxe (orthodoxie = juste doxologie ou glorification), dit :

« Gloire à TOI, Père et Fils et Saint Esprit, gloire à TOI ! « 

Quand cette prière de doxologie devient la vie qu’on est en train de vivre, notre vie devient véritable.

La Révélation Trinitaire est la Lumière des lumières.

3 – Comment Dieu s’est-Il révélé Trinité ?

Dans l’Ancien Testament, Abraham voit venir à lui trois anges revêtus de la forme humaine. Il se prosterne devant eux. S’adressant à eux, il parle au singulier, comme s’ils n’étaient qu’un seul.

« Seigneur », leur dit-il, « je T’en prie si j’ai trouvé grâce à TES yeux, veuille ne pas passer près de TON serviteur sans T’arrêter. »

Pour le peuple juif attaché à la croyance au Dieu unique, cette scène symbolique traduit cette révélation que Dieu est unique en trois personnes.

Dans le Nouveau Testament : âgé de trente ans, Jésus Christ se fait baptiser dans le Jourdain par Jean le Précurseur, dit le Baptiste. A ce moment se produit une « manifestation » de Dieu, ou THÉOPHANIE. Sous forme de colombe, le SAINT ESPRIT descend sur CELUI qu’on baptise, et le Père dit : « Celui-ci est mon FILS bien-aimé. Il a toute ma faveur. »

Ainsi les trois personnes divines ensemble révèlent que Dieu est unique en trois personnes. Avant la Passion du Christ, se produit la scène de la TRANSFIGURATION. La nuée lumineuse figure le SAINT ESPRIT, et le PÈRE prononce : « Celui-ci est mon FILS bien-aimé. Ecoutez-le. »

Ainsi les trois personnes divines ensemble révèlent que Dieu est unique en trois personnes.

Inspiré par Dieu, le Nouveau Testament fut écrit par des Apôtres, témoins oculaires et directs du Fils qui est Dieu fait homme.

Multiples témoignages dans l’évangile selon l’apôtre Jean 3, 16-17 où Jésus dit à Nicodème :

« Oui, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son FILS UNIQUE pour que tout homme qui croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle. Car Dieu n’a pas son FILS dans le monde pour condamner le monde, mais pour que le monde soit par Lui. »

3, 34-36 où Jean-Baptiste répond au Juifs :

« Celui que Dieu a envoyé prononce les paroles de Dieu, qui lui donne l’ESPRIT sans mesure. Le PÈRE aime le FILS, il a tout remis en sa main. Qui croit au Fils a la vie éternelle ; qui refuse de croire au Fils n’aura pas la vie, la colère de Dieu pèse sur lui. »

4, 34 où Jésus enseigne ses disciples :

« Ma nourriture est de faire la volonté de CELUI qui m’a envoyé et d’accomplir son œuvre. »

5, 19-20 Et encore :

« Le FILS ne peut faire de lui-même rien qu’il ne voie faire au PÈRE. Ce que fait le Père le Fils le fait pareillement. Car le Père aime le Fils et Lui montre tout ce qu’Il fiat. Il Lui montrera des œuvres plus grandes encore que celles-ci, et vous en serez stupéfaits. »

6, 55-58. En annonçant l’Eucharistie, dans la synagogue de Capharnaüm : « Ma Chair est vraiment une nourriture, mon Sang est vraiment une boisson. Qui mange ma Chair et boit mon Sang demeure en moi et moi en lui. « De même qu’envoyé par le PÈRE, qui est vivant, moi je vis par le Père : de même celui qui me mange vivra aussi par moi. Voici le pain descendu du ciel !… »

7, 37-39. « Le dernier jour de la fête, le grand jour, Jésus debout, lança à plein voix : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi. Et qu’il boive, celui qui croit en moi ! C’était dit selon le mot de l’Ecriture : de son sein couleront des fleuves d’eau vive. Il parlait de l’ESPRIT que devaient recevoir ceux qui croient en Lui.

10, 38. « Sachez une bonne fois que le Père est en moi, ET MOI DANS LE PÈRE. »

14, 25-26 – « Je vous ai dit ces choses alors que je demeurais avec vous. Mais le Paraclet,

le SAINT ESPRIT, que le PÈRE enverra en mon nom, vous enseignera tout ET VOUS RAPPELLERA CE QUE JE VOUS AI DIT. »

4 – Le mystère est l’étoffe de notre vie.

Quand on aime quelqu’un, de quoi est faite la vie brûlante de cet amour ? Cet élan vers un autre, cette anxiété, cette attente, ça veut dire quoi ? Au fond d’un violent chagrin, qu’y a-t-il ? Pourquoi sommes-nous toujours en chemin vers un bonheur dont nous ne parvenons jamais à franchir le seuil ? Pourquoi n’arrêtons-nous pas de vouloir ce bonheur, même aux pires creux de la désillusion ou du désespoir ? Pourquoi faut-il vivre quand même ? et pourquoi parle-t-on encore de vivre quand on a pu dire quand même ?

Par quels mots traduire : « Je suis », et : « Je suis moi, pas un autre » ?

Par quels mots traduire : « Je suis aussi tous les autres », et : « un autre est en quelque sorte moi-même »? Les mots font comme de la fumée, et l’on ne voit plus le feu de la pensée qui les dictait. Les pensées ont la chaleur du feu, mais il n’y a plus ni mot ni pensée pour essayer de parler de ce qui brûle. Notre vie est ce feu que nous n’avons pas allumé.

Comment comprendre le pourquoi de notre naissance ? Et cette famille-là plutôt qu’une autre ?

Et tout ce qui s’est enchaîné pour tisser une existence, ses histoires et son histoire ? A chaque instant nous touchons le mystère, et nous baignons en lui de même qu’il baigne en nous.

Or, c’est en croyant Dieu qui SE révèle que nous pouvons commencer d’apercevoir notre vie, et toute la vie, dans un commencement de lumière.

Quel que soit l’âge atteint, chacun de nous se trouve, à chacune de ses prises de conscience, devant un commencement.

En latin, le mot « commencement » se dit « initium ».

Prise de conscience veut dire : initiation.

Nous ne faisons que passer par des initiations. La vie est initiatique.

Commencer : quoi ?

A chaque prise de conscience, il s’agit de commencer de vivre. Nous n’arrêtons pas de naître et de renaître. Et aussi de mourir pour naître de nouveau. Dans la vie d’un être humain, même s’il quittait cette terre avant la vingtaine d’années, il y a plusieurs essais de vivre sis entre une date de berceau et une date de tombe.

Alors, considérons la vie du monde.

La création. Adam et Eve : première humanité. L’état paradisiaque : cette évidence de Dieu présent, cette présence de Dieu « qui va de soi ».

Et puis cet accident dans l’exercice de la liberté, cet « enfantillage » : le péché. Contre l’évidence, l’humanité s’imagine qu’elle se déifiera en tirant sa lumière d’elle seule, sans recours à un Dieu extérieur qui seul est Dieu. Quelle initiation ! ils virent qu’ils étaient nus… »

Et puis cette pitié de Dieu, ces alliances avec un peuple au caractère ingrat, peut-être le plus indocile de tous. Cette annonce répétée que tout sera rétabli. Cette préparation de la restauration de tout, dont l’Ancien Testament narre l’histoire. Cette silhouette du Messie qui se dessine peu à peu. Une lignée qui commence par David, assassin d’Urie et repentant, et qui s’achève par Marie, aboutissement d’une accumulation de saintetés jusqu’à la sainteté parfaite, et par le Dieu fait homme : Jésus Christ.

Et puis l’Incarnation du FILS. Le baptême que LUI-MÊME (qui est Grand Prêtre) daigne recevoir de sa créature Jean. Et, dans cette Théophanie plus-que-merveilleuse le Purificateur divino-humain, par l’eau du Jourdain, rétablit les vibrations de la grâce divine incréée dans le cosmos.

Et enfin cette parole : « Mais le SAINT ESPRIT, que le Père enverra en mon Nom vous enseignera tout et vous rappellera ce que je vous ai dit… » C’est la Tradition vivante qui jaillit des entrailles du Dieu fait homme, c’est l’ÉGLISE, Evangile continué dans l’Esprit-Saint.

Au fond de la vie comme au fond de chacun de nous, il y a : d’abord l’image de Dieu… et puis un élan vers autre chose, comme un chemin menant quelque part.

Élan vers quoi ? Chemin vers où ?

Il faut entendre Dieu là où Il nous initie à la vie. C’est dans l’Eglise, qui nous offre le lieu où Dieu parle à l’homme et où l’homme parle à Dieu. Et là Dieu répond :

– l’homme est créé à mon image POUR atteindre ma Ressemblance.

– cela veut dire que l’homme est fait pour devenir dieu, et que

la DÉIFICATION est le BUT de tout ce qui existe

– de l’image à la ressemblance (ou, si l’on veut, de ce qui est créé jusqu’à l’Incréé qui fait de nous ses enfants, c’est à dire des dieux) : voilà l’élan qui nous emporte, voilà le chemin tracé au fond de nous comme au fond de toute la vie.

La vie baigne dans le mystère, parce qu’au fond de la vie ce qu’il y a, ce n’est pas « quelque chose », mais « quelqu’un ».

Dieu est QUELQU’UN, et Il AGIT.

Ce que nous appelons mystère, cela désigne la vibration surpuissante de Dieu au fond de tout ce qui existe. La création est un dans le multiple, et cette œuvre est signée : Dieu-Trinité, l’Un dans le Multiple.

C’est cela que nous saisissons comme UNE ÉVIDENCE avant même de savoir que deux et deux font quatre, ou qu’il fait beau, ou qu’il pleut.

Il est bon de s’arrêter sur cette évidence. Et d’en avoir le souffle coupé.

5 – Inconnaissable et connaissable

S’asseoir pour se regarder marcher : ne serait-ce pas le comble du ridicule ? Et pourtant, se mettre à raisonner et à fabriquer des formules pour définir la vie : cela procède de la même sottise.

Dieu ne parle pas à l’homme pour satisfaire la curiosité de sa créature. Cette remarque souligne la différence qui existe entre la prédication chrétienne et les doctrines prétendues ésotériques ou occultes, vers lesquelles nous voyons se précipiter maints esprits. L’Eglise n’enseigne que ce qui est utile à la vie.

La révélation divine ne s’adresse pas à des amateurs. Elle s’adresse à ceux qui ont compris l’utilité, quand on est un être vivant, de s’éveiller, devenir lucide, conscient le plus possible et responsable :

bref, l’utilité de se tenir en état de veille, au lieu de faire de sa vie l’analogue d’une rêverie parfois apparentée au cauchemar.

On n’a donc pas tout dit quand on a réduit le mystère à une réalité qui serait « au-dessus » de notre raison.

Non seulement il est « au-dessus », mais, plus encore, il est AUTRE CHOSE.

De même, on a mal parlé de Dieu en se contentant de le concevoir comme une nature « au-dessus » de nous. Non seulement Dieu est « au-dessus », mais plus encore, Il est le TOUT-AUTRE.

Nous nous mouvons dans un univers créé : avec l’espace, avec les limitations, avec le temps.

Dans un état de l’être où tout fut tiré de rien, où rien ne peut exister sans avoir commencé :

un état encore très loin de son achèvement et qui ne dispose absolument pas des moyens de s’achever par lui-même. Un homme mûr ne peut pas plus s’empêcher de vieillir qu’un enfant ne peut s’empêcher de grandir. De là vient ce que nous ne pouvons pas saisir la vérité intime de

Dieu : elle échappe à tout ce que nous observons, pensons ou imaginons.

Pour désigner Dieu, le terme hébreu : « Yaveh » en dit long sur notre impossibilité de connaître l’essence de Dieu. YAVEH = Je SUIS celui qui EST.

Plus que « l’être » (tel que ce mot signifie pour nous quelque chose), Dieu est l’Étant : la SOURCE qui dit « JE » sans jamais pouvoir dire « J’ai commencé », ni « Je deviendrai ceci ou cela ». La SOURCE de la vie et de l’être, dans la réalité jamais commencée de sa sur-plénitude. Pas de commencement; aucune limitation ; pas de temps et pas d’espace pour Le mesurer; pas d’évolution mais un présent pour lequel il n’y a pas plus de passé que d’avenir. L’être total et absolu de la vie totale et absolue.

Notre intelligence n’a pas les moyens de définir Dieu, de Le mettre en formules, de Le comprendre. Notre imagination, moins encore. Expliquer, c’est comparer. On n’explique pas Dieu, car rien ne saurait Lui être comparé. Les mots se cassent en route, le souffle est coupé.

Dieu est le TOUT-DIFFÉRENT.

Voilà pourquoi, fidèle à l’enseignement des Pères et des conciles, la théologie orthodoxe se veut une théologie négative, ou APOPHATIQUE, dès qu’il s’agit de la vérité intime de Dieu.

APOPHATISME dire ce que Dieu N’est PAS, ou : voie d’approche du mystère divin PAR

NÉGATION de ce qui n’est pas Lui. Nous ne pouvons approcher Die qu’en nous débarrassant de nos propres pensées, de nos images, du poids de nous-même.

Autrement dit, quand il s’agit de Dieu nous progressons en intelligence par prise de conscience de ce que nous NE pouvons PAS loger dans notre esprit. Voir Dieu dépasserait tellement nos capacités vitales qu’elles voleraient en éclats. Moise, sur le Sinaï, ne put supporter la vue de la gloire de Dieu.

De même les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean, sur le Thabor où ils furent témoins de la Transfiguration du Christ. Une nuée vint à leur secours, et la voix du Père se fit entendre à travers la nuée.

Dieu tel qu’Il est Se manifeste par ce qu’on appelle : la GLOIRE DE DIEU. Par gloire, entendons :

le « trop-plein » de sa lumière sur-éclatante. Imaginons un feu qui brûle tout ce qui l’approche.

Et nous serons en deçà du réel.

Pour que nous puissions vivre, il faut que Dieu retire ce « trop-plein » de sa présence insoutenable : il faut qu’il retire sa GLOIRE, faisant « comme s’Il n’était pas là » afin que nous, nous puissions subsister.

Plus l’on approche de Dieu et plus l’on EXPÉRIMENTE que la connaissance de Dieu consiste en une inconnaissance. Autrement dit, dans cette ignorance sans cesse plus consciente d’elle-même et vibrante d’amour.

Et pourtant, Dieu Se manifeste.

Inconnaissable dans sa nature intime, ou dans son essence, Dieu Se fait connaître par la manifestation de ses énergies.

Nous connaissons Dieu en tant qu’Il AGIT : et c’est à ce propos que nous pouvons parler de la grâce.

Energies incréées de Dieu = la grâce Dieu Se donnant à nous comme lumière, afin qu’ainsi nous devenions lumineux.

Dieu a tout créé par sa grâce. Ce qui veut dire : par ses énergies. Par sa lumière donatrice de la vie et de l’être.

La création manifeste Dieu AGISSANT.

Dieu S’est fait homme en Jésus Christ. Celui qui contient tout, et plus que tout devient l’un des nôtres. Le FILS, image parfaite du PÈRE, prend sur Lui notre nature humaine ; et le SAINT ESPRIT nous a donné, et nous donne encore à chaque instant, des yeux pour reconnaître qu’Il est le Fils et qu’Il est Dieu.

Dans la grâce (ou lumière incréée) du Saint-Esprit, nous Lui disons : « TU es le Christ, LE FILS DU DIEU VIVANT ! »

La contemplation mystique est « notre » seule connaissance de Dieu. Elle consiste en cette clarté du cœur purifié par la lumière divine. Il faut devenir soi-même lumière pour approcher CELUI qui EST la lumière.

LE CHRIST, SIGNIFICATION DE NOTRE VIE

6 – L’homme devant la Vérité faite homme.

7 – Le Christ, équilibre de notre vie.

8 – Des hérésies au dogme de Chalcédoine, en 451.

9 – (suite)

« A notre époque, qui est théosophique, on cherche à saisir « le Christ cosmique ». « Mais la Croix disparaît. Et nous avons un Dieu de seconde zone.

« La piété des derniers siècles est tout aussi mauvaise. Exemples : « le Crucifié » « le Sacré-Cœur « …

Là, il n’y a plus de place pour la divinité. Autre exemple : « la crèche de Noël », « le crucifix », « le chemin de croix ». Là on sent l’homme, et non plus Dieu.

« Le Christ nous apporte la communication progressive, dynamique, de notre « RESSEMBLANCE à la divinité.

« Non seulement le Christ a pris notre essence. Mais il faut voir en Lui un processus dynamique :

Il s’engage pleinement dans l’humain. Non pas statistiquement Il entre dans notre étoffe. Et cela veut dire qu’étant Dieu parfait, Il passe par toutes les étapes de notre humanité. Le Christ revit toute l’histoire de l’humanité. Pas seulement : homme parfait ; mais homme historique. Cet homme qui est notre Dieu, le Dieu parfait : petit enfant, et Dieu prééternel. »

Evêque Jean de Saint-Denis, notes de cours 1957 à l’Institut de théologie St Denis

6 – L’homme devant la Vérité faite homme.

Le FILS, qui est Dieu égal au Père et à l’Esprit, S’incarne : Il se fait homme et comme s’Il était une créature, Il prend une place dans l’histoire de l’humanité. Ce qu’Il apporte, ce n’est pas seulement une doctrine comme le firent les brahmanes de l’Inde, ou Bouddha, ou Lao-Tseu.

C’est ce qu’on appelle la vérité plénière : autrement dit la Vérité totale, avec toute la vie dedans ; ou encore : une Vérité dont dépend toute la vie de l’homme et des univers.

Douze siècles avant l’Incarnation du Fils, apparurent dans l’Inde mystique des hymnes, ou Véda. Les uns s’adressaient à la divinité, mais tout y était symbole, et Dieu semblait être « quelque chose au-dessus de nous » bien plus que QUELQU’UN. Les autres mentionnaient des pratiques de culte, apparentées à la magie. D’autres, des mélodies et des prières pour agir sur le monde invisible. La religion védique butta sur le problème du bien et du mal, et l’on se mit à supposer l’existence de deux dieux antagonistes. Plus tard, les Perses développèrent cette idée d’un Dieu pour le bien, d’un autre Dieu pour le mal. La chair semblait être une chose mauvaise. On n’imaginais de Dieu bon que pour les esprits.

Du védisme naquit peu à peu, dans l’Inde, une religion nouvelle : celle des brahmanes (prêtres) ou brahmanisme… Moins de rites, un souci plus profonde de percer les mystères de la mort et de l’au-delà. Mais la Vérité restait le monopole de la caste des prêtres. Les « Brahmana » et les « Upanishad » sont des livres secrets, que seuls quelques initiés pouvaient comprendre en partie.

La vérité sur Dieu s’éloignait de plus en plus de l’intelligence humaine. L’abîme se creusait entre le Dieu Vivant, de plus en plus lointain, et l’esprit des hommes.

Toujours dans l’Inde, vint Bouddha (de 560 à 480 avant l’Incarnation du Fils), et un courant nouveau, le bouddhisme, partit du brahmanisme. Il ne s’agit plus que de trouver des voies nous permettant de sortir de l’énorme souffrance de ce monde. Mais c’est plus une philosophie qu’une religion et, de plus

en plus nettement, Dieu apparat comme inaccessible à l’homme. L’illumination ne conduit plus du tout à un Dieu qui serait QUELQU’UN.

Philosophe chinois, Lao-Tseu répand un autre enseignement, environ 500 ans avant l’Incarnation du Fils. Il laisse un livre, le « Tao-Te-King », ou « La Voie ». Une grande sagesse l’inspire, mais elle situe l’homme à l’extrême opposé d’un Dieu qui serait QUELQU’UN.

Et puis voici le christianisme, radicalement différent de toute religion venue avant ou après lui.

C’est bien plus qu’une religion !… c’est l’initiation plénière à la vie, donnée à l’homme par Celui qui EST la Vie.

Plénitude et initiation : la Vérité plénière, qui n’est plus seulement « quelque chose », mais QUELQU’UN. Plus d’abîme entre l’homme et son Dieu.

Or ce mystère du Fils incarné est exposé, dans l’Evangile d’une façon telle que, sauf ILLUMINATION SPÉCIALE, il peut nous échapper.

Chaque phrase des Saintes Ecritures ressemble à un oiseau. Très souvent elle nous échappe.

Nous pouvons lire mille fois tel ou tel passage sans qu’il parle à notre cœur. Et un beau jour, tout à coup, nous voyons qu’il nous concerne et que ce qu’il contient touche au plus brûlant et au plus profond de notre vie. Que s’est-il alors passé ? Le SAINT ESPRIT nous a donné par grâce des yeux pour voir, des oreilles pour entendre, un tact pour saisir. Et, dans sa lumière qui nous a rendus lumineux, nous reconnaissons un secret de notre vie dans la phrase lue et relue souventes fois.

C’est dans la TRADITION qu’au moment voulu nous saisissons ce qui nous échappait sans cesse. Or, qu’est-ce que la TRADITION ? Le Saint-Esprit Lui-même qui SE fait mémoire et discernement de l’Eglise.

L’ÉGLISE EST CETTE VIE MYSTIQUE OU, DANS LA LUMIÈRE DE DIEU, NOUS RECONNAISSONS DIEU QUI PARLE À L’HOMME ET LUI INSUFFLE VIE.

Très souvent nous voyons les gens prendre dans l’Evangile ce qui leur plaît : ce qu’ils entendent comme venant d’eux-mêmes… sans se soucier que Dieu ait parlé et qu’Il leur ait dit quelque chose.

Les hommes font comme si Dieu ne LEUR avait pas parlé, ils font comme s’il leur suffisait de se parler à eux-mêmes en appelant « Dieu » ou « Vérité » ce qui satisfait leurs humeurs de l’instant.

Font-ils ainsi par méchanceté ? Non. Ou, du moins, pas uniquement. Plus que la méchanceté, c’est la routine qui les rend opaques et imperméables . Routine une résistance passive à la lumière. Et pourquoi les choses se passent-elles ainsi ?

Parce que la Vérité plénière (ou : Vérité avec toute la vie dedans) nous engage.

A quoi ? Précisément, à prendre conscience que notre vie se traîne, qu’elle n’est pas achevée, qu’il va falloir commencer de vivre vraiment, recevoir l’Illumination. Et l’homme a peur de cette Vérité qui engage. Il a peur de se jeter dans le feu. Il recule devant la lumière et, fermant les yeux, il s’invente des lumières à lui, il se fabrique un « Dieu » à sa taille, un « Dieu » commode qui lui permettrait de rester dans sa confortable routine.

Voilà pourquoi, au bout de bientôt 2.000 ans, l’Evangile demeure une chose tout, neuve, un COMMENCEMENT au sens plein, une « bonne nouvelle ».

Dans la routine, il y a le fanatisme : pour l’homme aveuglé par le péché, il est toujours plus commode d’imaginer un Dieu tellement grand que, fatalement, il écraserait l’homme. Et l’on va ainsi, dans une marche cahotant d’un Dieu qui écrase tout à un humanisme qui, pour respirer à l’aise, chasse Dieu de ses horizons. Dans les deux cas, le divin est expulsé : soit parce que trop grand et inaccessible, donc inintéressant ; soit parce que trop gênant et, pour cette raison encore, indésirable.

Par exemple, les religions orientales ne veulent que Dieu ; elles méprisent l’humain, se soucient peu de civilisation et de progrès ; tandis que les religions d’Occident, au contraire, ne veulent que l’humain, le terrestre, l’actif, et se débrouille finalement pour parler le moins possible du mystère et de Dieu. Ce qu’il y a de bouleversant dans la révélation chrétienne, c’est a dire dans l’Incarnation du Fils, c’est : Dieu ET l’homme. Le Christ apporte LES DEUX !

7 – Le Christ, équilibre de notre vie

L’Incarnation du FILS apporte sa solution au problème qui déchire spirituellement la conscience humaine : celui de l’équilibre de la vie en général et de notre vie en particulier.

La souffrance spirituelle provient d’un déséquilibre dont nous ne pourrions sortir par nos propres forces.

Déséquilibre venu de la prétendue « religion » : rien que Dieu, rien que l’esprit ; tout le reste est méprisable, et la chair est maudite, la terre est sale, nous voici dans un bain empoisonné, dans une épaisse prison. C’est la déviation religieuse.

Suivant cette déformation des hommes cherchent la Vérité et, parce qu’ils cherchent la Vérité, ils font du mauvais travail, des affaires désastreuses ; ils privent de leur sécurité indispensable femme, enfants, tous ceux dont ils sont responsables ; ils deviennent inefficaces dans le domaine des nécessités pratiques, intolérants, voire menteurs et criminels.

Les choses allant souvent de cette manière ; Lénine n’était pas fou quand il disait que la religion est « l’opium du peuple ». De fait, cet opium, ce poison, c’est l’attitude monophysite (= ne vouloir qu’UNE SEULE nature, celle de Dieu, et mépriser la nature humaine, la tenir pour rien et moins que rien.)

Ayant compris quelque chose à cela, d’autres se débarrassent de la religion, comme on sortirait d’un état d’ivresse ou d’une fièvre délirante. Ils disent : rien que l’homme et la terre, mettons Dieu de côté, entre parenthèses, comme un superflu quelque peu consolant en certaines circonstances. C’est l’humanisme occidental, tel qu’il apparut à la fin de notre moyen-âge qui en avait assez de voir l’homme se mépriser lui-même au nom d’un Dieu écrasant. Cette attitude procède de l’arianisme (= doctrine de l’hérétique Arius, pour qui le Christ pouvait être un homme, mais pas réellement un Dieu.)

Dans les deux cas, l’être humain s’enferme, par routine, dans une prison dont il lui devient difficile de sortir sans dommage.

Au cours des 20 derniers siècles écoulés, on a vu les chrétiens pécher contre l’Incarnation du Fils et contre le Saint-Esprit :

– soit en s’enfermant dans une piété toute intérieure, fanatique, ennemie du corps et de la matière ;

– soit en s’enfermant dans un « humain » évoluant à côté de Dieu, comme si le divin ne pouvait CONCERNER l’humain.

Or, le vrai christianisme n’est ni « religion » ni « humanisme », mais le rapport des deux, dans un ÉQUILIBRE récupéré.

Cet équilibre exige de nous un effort, une tension très forte, un dépassement de tout ce que nous avons l’habitude de penser, de croire et de vivre. Quelque chose comme un mur, en nous, doit être défoncé. Quelque chose comme une porte doit être forcé. Quelque chose en nous, doit casser.

Prenons un exemple :

L’Evangile raconte que Lazare, ami du Christ, vient de mourir. On l’a mis au tombeau, il pue déjà.

Avant de la ressusciter, Jésus arrive devant le tombeau et… Il pleure. Il pleure !

Logiquement, c’est complètement idiot : comment, cet homme est Dieu, Il se prépare à ressusciter son ami… et Il pleure, comme s’Il ne croyait pas en Lui-même ? Un instant s’écoule, et le même Christ dit : « Ouvrez cette pierre ». Et Lazare sort. Nous ne comprenons pas ces deux attitudes apparemment contradictoire. Notre logique se révolte.

Autrement dit, notre ROUTINE SPIRITUELLE se sent, devant ces DEUX attitudes du même Christ, mal à l’aise, dépaysée, contrainte à casser quelque chose… ou à SE dépasser. Et en effet, l’HOMME pleure et DIEU ressuscite Lazare. Dans le même personnage, Jésus Christ, l’humain est totalement humain, avec ses sentiments et sa douleur, le divin est totalement divin, avec sa puissance et sa permanente victoire.

Dans le Christ, tout reprend sa place exacte. L’homme est l’homme. Dieu est Dieu L’humain ne chasse pas le divin. Le divin n’écrase pas l’humain.

Quel équilibre dans notre vie !

Le corps a valeur et qualité. La terre n’est pas sale. La matière n’est pas méprisable du fait qu’elle est matière. Notre tendresse pour les êtres a valeur et qualité. Notre travail de chaque jour a valeur et qualité. Une voiture neuve, un compte en banque, un jardin avec ses fleurs ou ses légumes, ça a valeur et qualité. Une nuit d’amour véritable a valeur et qualité. Notre appréciation d’un bon repas a valeur et qualité. Faim et soif ne sont pas sales.

Le Christ a mangé, bu, dormi ; Il a exercé son corps. Sa mission l’exemptait de toute nécessité sexuelle, mais Il n’a jamais condamné le sexe, et même la prostituée Marie-Madeleine est devenue son amie. Etant HOMME, le Christ a sauvegardé toutes nos capacités.

D’où vient que l’homme ne s’est pas immédiatement et définitivement réjoui de cela ?

Pourquoi la persistance du déséquilibre vital après la sanctification de la chair et du monde sensible par le FILS fait homme ?

Les racines du péché, c’est l’orgueil : et son orgueil, l’homme aveuglé par le péché le projette sur l’image qu’il SE fait de Dieu. Mgr Jean disait que cet orgueil est « comme la cigarette du diable » : je ne veux pas d’un Dieu qui devienne inférieur à MES conceptions… C’est pourquoi, même ayant vu le Christ ou reçu l’enseignement de ses témoins, beaucoup se sont réfugiés dans leur idée de Dieu plutôt que de vouloir admettre Dieu tel qu’Il s’adresse objectivement à nous, par son incarnation.

Pour le pécheur enseveli dans son orgueil « religieux » : refus d’admettre qu’il n’y ait plus d’abîme entre Dieu et sa créature humaine. On est tellement plus tranquille, au fond de son petit confort aménagé et décoré avec des idées trop grandes… qui sont des idées courtes !

Refusant l’abaissement d’un Dieu qui SE fait homme pour que, dans le dépassement, l’homme retrouve l’équilibre de sa vie, le péché religieux a préféré l’exaltation des idées humaines… en prenant Dieu pour prétexte et pour alibi.

Or, en Christ, le divin a pénétré l’humain pour que l’homme devienne Dieu et soit ainsi pleinement lui-même. C’est l’équilibre de la vie !

8 – Des hérésies au dogme de Chalcédoine, en 451

L’Eglise promulgue un DOGME quand une hérésie menace l’accès des hommes à la vérité plénière, c’est à dire à l’équilibre de la vie.

L’histoire théologique des 5 premiers siècles chrétiens contient ces faux problèmes qui ne cessent de grouiller au fond de nos âmes, et auxquels, par le dogme d’Eglise, le SAINT ESPRIT a déjà et définitivement répondu.

En faisant des DOGMES, l’Eglise pose comme des balises sur notre chemin de vie : si tu passes par là, c’est la vie… ; si tu t’en écartes, tu perds dangereusement tes énergies et ton temps… et tu auras du mal, par la suite, à retrouver ta route !

Or donc, par routine, ceux qui reçoivent le témoignage des apôtres ont du mal à accepter l’humanité du Christ. Ils sentent qu’un tel événement va les déranger de leurs habitudes. Refusant le dépassement que cela impose, ils vont « accommoder » la révélation à leurs points de vue. Ils disent : l’humanité du Christ ? mais ce ne fut qu’une apparence, il n’y avait là qu’une forme, une illusion savamment calculée.

C’est l’hérésie DOCÉTISTE.

Docétisme = l’humanité complète du Christ est niée, on la réduit à une apparence.

Or, un apôtre, témoin direct du Christ répond aux docétistes : c’est saint Jean qui, vers 105, écrit le quatrième évangile.

De même, le saint évêque martyr Ignace d’Antioche, le saint évêque martyr Irénée de Lyon.

Par eux, l’Eglise défend la vie humaine contre un mépris de l’humain.

Le docétisme fait son chemin dans le schisme des Novatiens : on y voit se développer un faux angélisme, une peur blême des appétits humains les plus naturels (la faim, la soif, le sexe…) Un idéal de fausse « pureté », qui engendre l’hypocrisie l’intolérance, l’insulte à l’homme.

Sur cette lancée, les faux gnostiques[1] répandent chez les intellectuels leur mépris de la matière.

Un deuxième courant d’hérésie christologique provient d’une attitude religieuse savante et abstraite : celle des brillants philosophes grecs. Ils pensent : devant être inaccessible, Dieu ne peut pas être sali par la création. C’est une projection de leur orgueil intellectuel sur leur image ou conception de Dieu. Il leur faut un Dieu qui « colle » avec leurs idées.

Ils pensent, en conséquence, que le Verbe Incarné, Jésus Christ, doit prendre modestement la place d’un « Dieu second », intermédiaire entre le divin véritable et l’humain. C’est d’autant plus facile que les Grecs ont toujours soutenu l’existence d’un « démiurge » entre Dieu et le monde. Dieu est trop parfait, disaient-ils, pour avoir créé des choses non parfaites ; donc, il y a des intermédiaires. Par exemple, le philosophe Basilide parlait de 365 intermédiaires entre Dieu et la création, qu’il appelait les « éons ».

Cet enseignement rationaliste refuse un Dieu-fait-homme au nom d’une certaine logique de la grandeur de Dieu. Selon ses vues, le Verbe peut être une sorte d’idée unifiante au-dessus du cosmos, une espèce de conscience du monde ; mais Verbe ne saurait signifier « Dieu ».

Au IVème siècle, un prêtre d’Alexandrie, nommé Arius, prend ces idées à son compte et enseigne que le Christ n’est qu’une créature et non pas en vérité le Fils de Dieu. C’est l’hérésie arienne ou arianisme. Par la suite, étant propagée par l’évêque germanique Ulfila, elle se répand dans les peuples germaniques et, par eux, sur tout l’Occident.

Cette hérésie creuse un abîme entre le Père et le Fils. Elle consiste en la destruction pure et simple du christianisme.

Vers 400, le grand poète Apollinaire polémique contre les ariens; il est évêque, et il fait le raisonnement suivant : Oui, le Verbe est Dieu, et Il est devenu homme. Mais comment, en Christ, voit-on l’humanité s’unir à la divinité ? Dans le corps et dans l’âme certes, mais pas dans l’esprit. De sorte que l’esprit du Christ serait uniquement divin et non pas Dieu-et-homme.

Apollinaire essaie de concilier son refus d’une humanité complète du Christ avec l’enseignement de l’Eglise promulgué aux deux grands conciles œcuméniques de Nicée, en 325, et de Constantinople, en 381.

Où est chez lui l’hérésie ?

Pour le saisir, il faut savoir que l’homme est : corps, âme, esprit. Indissociablement. Et que, si le Christ n’était homme que par le corps et l’âme seulement, mais pas par l’esprit (qui serait uniquement divin), le Christ ne serait pas totalement un homme.

C’est toujours le refus d’un Dieu qui se fait homme… qu’on retrouve, dans les années 420, dans l’hérésie d’un patriarche de Constantinople nommé Nestorius. L’hérésie nestorienne ou nestorianisme = Jésus Christ n’est qu’un homme au moment de sa naissance, et c’est seulement

au moment de son baptême que « le Verbe de Dieu est descendu sur l’homme Jésus. »

Et, pour illustrer cette doctrine, Nestorius dit : la Vierge Marie fut la « mère du Christ » (en grec :

Christotokos), mais elle ne saurait être appelée la « mère de Dieu » (en grec : Théotokos).

On retombe dans le même rejet d’une révélation chrétienne qui serait la Vérité plénière.

Dans cette vision étriquée d’un Dieu qui ne serait, dans l’homme Jésus, que comme dans un véhicule. Et alors disparaît le sens de notre vie tel que Dieu nous le révèle : si les hérétiques ont raison, alors, l’homme ne deviendra jamais Dieu.

Mais les hommes, auraient-ils raison contre Dieu qui parle à l’homme ?

Les balises de la foi sont posées, en 325 et 381, par les deux conciles de Nicée et de Constantinople qui produisent le SYMBOLE DES APÔTRES en sa rédaction totale et définitive :

« Je crois en Dieu, le Père tout-puissant… »

En 431, un troisième concile œcuménique, celui d’Ephèse, proclame que la Vierge Marie est THEOTOKOS, c’est à dire en vérité Mère de Dieu.

Et cependant, la conscience humaine refuse encore la VÉRITE VIVANTE…

9 – Suite : des hérésies au dogme de Chalcédoine, en 451.

Nous venons de voir :

– le docétisme refuser l’humanité en Christ en disant que ce n’était qu’une apparence ; les philosophes grecs refuser un Dieu qui touche directement au monde : il pourrait se salir…;

– l’arianisme, toujours au nom d’une fausse idée de la grandeur de Dieu, nier la divinité de cet homme appelé Jésus Christ ;

– le nestorianisme prétendre que le Christ serait né comme un homme, rien de plus, et que la divinité – serait descendue sur lui après coup.

Nous venons de voir, malgré la proclamation de trois conciles œcuméniques (« le Saint Esprit et nous, unanimement, confessons…[2]. »), la conscience humaine refuser de croire Dieu en s’enfermant dans sa propre idée de Dieu.

L’hérésie est une foi subjective : je veux que Dieu soit tel que je l’imagine au bout de mes raisonnements.

La foi catholique (ou : foi intègre) est une foi objective : quand Dieu se manifeste et nous parle, je crois ce qu’Il nous dit parce que lui seul est Dieu et que nous ne sommes que des créatures dans le péché.

Mais le refus de la vérité plénière continue, à propos du Christ…

Des moines et des mystiques d’Orient protestent vigoureusement contre le nestorianisme.

Eutychès (378-454), devenu leur maître, tombe dans l’erreur opposée : dans le Christ, enseigne-t-il, le divin est si fort qu’il a absorbé l’humain, et qu’il l’a anéanti.

Maintenant, c’est l’humain qui perd sa valeur en soi.

Le motif, cependant, n’a pas changé : on veut toujours exalter faussement le divin, brandir l’idée d’un Dieu qui serait tellement grand, tellement « au-dessus de nous » qu’il ne pourrait à aucun prix nous toucher, ni concerner profondément notre vie.

Cette fois, nous avons l’hérésie monophysite, ou monophysitisme (=UNE SEULE NATURE en Jésus Christ, la nature divine… et, bien entendu, pas de nature humaine.)

C’est toujours, et invariablement, le refus de son humanité.

Alors, pour sauver la vie spirituelle (donc la vie tout court) de ses membres, l’Eglise tient son quatrième concile œcuménique, en 451, à Chalcédoine.

Et ce concile produit le DOGME CHRISTOLOGIQUE :

UNE SEULE PERSONNE en Christ : il est le FILS, Dieu comme est Dieu le Père et comme est Dieu le Saint Esprit, de même nature et substance que le Père et l’Esprit, UN SEUL DIEU dans la Trinité vivante ;

Et DEUX NATURES en Christ :

nature divine = il est totalement Dieu,

nature humaine = il est totalement homme.

HOMME COMME NOUS, SAUF LE PÉCHÉ.

texte du dogme

explication

« En accord avec les divins Pères…

EN ACCORD = c’est l’ambiance de l’Eglise. On n’est pas écrasé sous le texte des doctrines. Le peuple se reconnaît en eux, tout simplement : il constate que telle est bien sa foi. Il y a CONCORDE, et non pas « soumission ».

« …nous tous, unani-mement, enseignons de confesser…

ENSEIGNONS = c’est un ENSEIGNEMENT. On est dans un climat d’é­changes de vues : ce n’est ni un diktat ni une oukase, pas d’autorité extérieure, qui contraindrait les intelligences.

CONFESSER c’est s’engager sur une vérité, et s’y engager à fond. On confesse la Vérité sans toujours la saisir pleinement, avant d’en avoir compris toute la profondeur. On confesse parce que la majorité des vrais DOGMES est si vaste qu’ils dépassent notre horizon psychique ou moral ou intellectuel.

« …le seul et l’unique FILS Notre Seigneur Jésus Christ, parfait dans la divinité, parfait dans l’humanité… SEUL ET UNIQUE FILS pourtant, le Christ a dit : « Fils de l’Homme et « Fils de Dieu ». Cela indique une double filiation. En effet, FILS DE L’HOMME = le Christ est un produit de l’humanité ; il est l’homme par excellence.

FILS DE DIEU = le Christ est pleinement Dieu. Retenons : non pas « deux Fils », mais deux origines, la divine et l’humaine, de ce même Fils. Un seul Fils, mais deux filiations.

NOTRE SEIGNEUR = Seigneur (Kyrios) est le Nom divin

JÉSUS = c’est le nom humain

CHRIST = c’est le nom de l’homme déifié.

Nous avons là les TROIS ASPECTS DE NOTRE VIE dans le Christ :

1 – divinité = notre vie prend sa source et toute sa signifiance en Dieu ; nous sommes créés à L’IMAGE DE DIEU.

2 – humanité = c’est ce que nous sommes. Et Dieu devient ce que nous sommes.

3 – humanité déifiée = c’est ce que nous devons devenir pour réaliser le but de notre vie. Et notre Dieu qui s’incarne nous y emmène dans l’union de ses DEUX natures.

« sans confusion,

« ni séparation… »

ÊTRE CHRÉTIEN = perfectionnement de tout notre être, et dans l’humain (qui ne sera jamais négligé ni méprisé), et dans le divin.

Dans la communauté-Eglise, doivent exister LES DEUX perfection-nements. Ni séparés ni confondus.

Tout en boitant, les civilisations sorties du christianisme sont restées à la recherche de Dieu et à la recherche de l’épanouissement humain

Le dogme des DEUX NATURES, ou dogme de Chalcédoine, apporte son équilibre total à notre vie.

C’est très faux et très dangereux pour la vie spirituelle. Car le Christ est TOUJOURS homme parfait et TOUJOURS Dieu parfait. Inséparablement, et sans qu’un de ces deux aspects puisse faire oublier l’autre.

Dans son humanité, il vit pleinement l’abandon de Dieu : « Mon Dieu », dit-il sur la Croix, « pourquoi m’as-tu abandonné ?… » Mais au même instant, il est créateur des mondes.

Parce que, s’il n’avait pas réellement vécu l’abandon par Dieu (le froid d’une mort intérieure), il n’aurait été qu’une sorte d’homme « idéal » : alors qu’il a vécu NOTRE VIE (donc aussi NOTRE mort), étant homme parfait.

L’équilibre est dans le saisissement d’une même conscience : les DEUX à la fois.

Lucidité, en même temps, de l’abîme et de la joie.

Et, parlant dans l’Eglise par la liturgie, Dieu nous dit : « Par ton CORPS dans le tombeau, par ton ÂME dans l’enfer, Tu SIÈGES éternellement à la droite de notre Dieu. »

Le dogme des DEUX NATURES, ou dogme de Chalcédoine, apporte son équilibre total à notre vie.

Il apporte les RAPPORTS EXACTS entre Verbe et cosmos, entre Verbe et humanité.

Notons le déséquilibre des spiritualismes idéalistes : le Verbe, ou FILS, ne serait pas CHAIR dans le sens universel. Mais alors, comment concevoir la communion Les hérésies des faux gnostiques font encore leur chemin aujourd’hui dans les spiritualismes, dans les ésotérismes dégénérés et dans les occultismes.

Notons le cas, assez curieux, de ceux qui affirment l’impossibilité du miracle. Les croyants eux-mêmes en sont arrivés à dire : ne confondons pas « naturel » et « surnaturel ». Pourquoi ? Parce que, dans le miracle, on sent la présence de Dieu… et que, pour beaucoup de « croyants » installés dans ce monde, l’évidence trop sentie de la présence de Dieu a toujours quelque chose de gênant.

On voudrait une religion pas trop religieuse, juste un peu mais pas trop. On nous a fabriqué une religion mondaine.

Conçoit-on que, dans toute l’existence telle que nous la vivons, le FILS ou VERBE s’est fait CHAIR ? Alors, il faut se souvenir que TOUT a été créé par Lui. C’est LE DIVIN tel qu’Il est qui s’unit à l’HUMAIN tel qu’il est. C’est cela qui s’appelle comprendre l’Incarnation du Verbe.

Mais quand on isole le Christ… ou l’Hostie… de tout le contexte universel, on ne connaît plus rien, et le christianisme perd sa saveur, sa force et jusqu’à sa signification. Une part importante du christianisme occidental a, ainsi, fabriqué un monde à part. Cela procède d’une fausse idée de la « virginité » de la religion : enfermer Dieu dans un petit tabernacle pour ne pas le profaner !…

Le dogme de Chalcédoine nous crie :

Toute l’humanité est la CHAIR du FILS qui est Dieu parfait.

Et il s’ensuit qu’il n’y a pas d’humain sans Dieu.

C’est là que commence, pour nous, la vie véritable.

LES SEPT CLÉS DE LA VIE SPIRITUELLE

10 – La virginité de Marie, Mère de Dieu.

11 – Les anges.

12 – Ciel, terre et enfer.

13 – La prière.

14 – Les Saints.

15 – Les icônes.

16 – Les sacrements.

« Mes enfants, regardez votre âme comme une toile propre à recevoir l’image d’un roi. Avant que la grâce du Saint-Esprit ne vienne nuancer cette image, effacez de cette toile animée les passions qui la souillent. Je veux dire : effacez l’habitude de jurer, de mentir, d’insulter vos frères, de tenir des discours immoraux ou stupides en un mot toute habitude déréglée.

En effet, en parlant beaucoup on évite rarement de pécher. Si vous avez quelque chose à dire, une chose vraiment avantageuse à dire, parlez. Sinon, taisez-vous ! Quelle est votre profession ? Tu es artisan ? eh bien, chante des psaumes, chante-les mentalement si ta bouche ne le veut pas autrement ! Un psaume, c’est un utile compagnon.

Rien de pénible en cette occupation : tu transformes ton atelier en monastère par ce chant de ton cœur. La convenance des lieux de la prière contribue moins à la paix de l’esprit que la régularité d’une vie sainte. »

Le saint patriarche Jean Chrysostome de Constantinople, 344-407

10 – La virginité de Marie, Mère de Dieu.

Marie, la mère de notre Seigneur Jésus Christ, conçoit du Saint Esprit et non pas d’une semence humaine. Elle est vierge avant l’enfantement, vierge pendant l’enfantement, vierge après l’enfantement.

Avant de se recueillir devant l’icône de la très sainte et très pure Mère de Dieu il faut se souvenir de ce qui suit :

1 – Tout signifie. Cela veut dire qu’une réalité, sise en un plan donné, « parle de » ce qui lui correspond dans la hiérarchie des êtres, à des plans de plus en plus élevés, jusqu’à Dieu au-dessus de l’être. Car rien de ce qui est créé ne vient d’autre part que de la pensée de Dieu :

Il a tout créé par son Verbe, le Fils coéternel devenu Jésus Christ par l’Incarnation. Ainsi, toute partie de notre corps « signifie » quelque chose de ce corps glorieux qui sera nôtre, et quelque chose du Royaume. Tout ce que nous faisons avec quelque partie que ce soit de notre corps « signifie » quelque chose de ce que nous ferons dan le monde transfiguré qui sera le monde réel à jamais.

Il s’ensuit que, d’une part la virginité du sexe peut, en certains cas, désigner l’excellence de virginités plus hautes, et que, d’autre part, le fait de ne pas avoir d’activités sexuelles n’est pas seul, en nous, à désigner ces réalités plus hautes. Par exemple : les mains jointes ou les brasélevés quand on se met en prière, le jeûne du Carême préparant la formidable joie pascale, etc.

2 – La virginité, quand on va au fond des choses, ce n’est seulement pas le fait de s’abstenir d’activités sexuelles. Cette abstention, ou continence, n’a de valeur spirituelle que si, précisément, elle désigne autre chose que l’usage ou le non-usage du sexe, une réalité plus haute dont cet usage ou ce non-usage serait le signe et le symbole.

La virginité, c’est la conquête de l’état de transparence à Dieu. C’est devenir tout neuf pour Dieu.

C’est : devenir tel qu’à chaque instant ce sera « la première fois », se libérer de l’habitude et de la routine dès qu’il s’agit de Dieu, grandir dans une toujours croissante jeunesse à jamais tournée vers Dieu et resplendissante de sa lumière.

Pour le comprendre, prenons une image. Vous voici devant une rivière paisible, vous vous penchez et vous voyez ses eaux refléter le ciel. Si vous prenez un bâton pour remuer la boue qui s’entasse au fond, l’eau se trouble et ne reflète plus rien que ce qu’il y avait d’endormi au fond d’elle-même. L’eau était vierge quand elle contenait le ciel, elle a perdu sa virginité quand elle ne le contient plus.

Poursuivons notre image. Quelqu’un d’autre arrive au moment où vous avez troublé l’eau. Il s’assied au bord de la rivière. Peu à peu il voit celle-ci se purifier, la boue se déposer, le ciel de nouveau se mirer dans l’onde. Alors, la rivière a trouvé ou retrouvé sa virginité.

Il en va ainsi de l’homme dont « le problème » est : contenir ou ne pas contenir Dieu, le recevoir ou ne pas le recevoir. Voilà en quoi consiste la virginité.

Il s’ensuit que, pour tous les êtres, la virginité, c’est autant un état à conserver qu’un état à conquérir. Pour tous les êtres, sauf le Seigneur Lui-même et sauf Marie, nous verrons

pourquoi tout à l’heure. Ce qui nous empêche d’être vierge, ce n’est pas l’activité sexuelle essentiellement, c’est le trouble de notre âme. Où, si l’on veut, la prolifération et la déviation des désirs. Parce que ce trouble nous empêche de recevoir Dieu, de Lui être transparent. On ne « reste » pas vierge, on le « devient ». Telle est notre condition de pécheurs.

3 – Pourquoi le cas exceptionnel de Marie ? Autrement dit : pourquoi Marie devait-elle, pour devenir la Mère de Dieu, ne point connaître d’homme, conserver dans son corps le symbole charnel de la virginité de fait, « rester » vierge au lieu de la « devenir » après des chutes ?

La réponse à ces questions nous introduit dans les plus-que-merveilleux mystères de l’Incarnation du Fils consubstantiel au Père et à l’Esprit.

Le mystère de l’Eve nouvelle

Une femme a péché. La première Eve. Librement. Son compagnon Adam l’a suivie dans la chute, tournant avec elle le dos à Dieu, à la grâce incréée, aux lois vraies de la vie, à la vraie loi de nature.

Librement.

La proposition vint du monde céleste inversé : le serpent leur a promis qu’ils seraient « comme Dieu ». « Comme Dieu », mais sans Dieu, par eux-mêmes. Ils ont librement décidé que le volonté de Satan serait faite. Et, par le jeu de la solidarité de nature du fait qu’un homme « est » en même temps tous les autres, voilà toute l’humanité dans le péché. Dans le péché qui lui est devenu originel puisque, le temps étant ce qu’il est, tout être humain naît après Adam et Eve, héritier de leur choix anti-vie, esclave du diable et, par conséquent, sujet à la mort.

Dans sa miséricorde, Dieu fait alliance avec un peuple. Au sein de ce peuple, il prépare l’Incarnation du Fils qui arrachera l’humanité de son esclavage. A partir de Jessé, à partir du roi David, ce que Dieu prépare par générations sanctifiées successives, ce sont aussi deux créatures admirables, un homme et une femme. L’homme annoncera l’imminente venue du Messie, il préparera les voies par baptême, initiation au repentir : ce sera Jean, le Précurseur.

La femme mettra le Messie au monde, elle sera la Mère de Dieu : et voilà Marie.

Quel équilibre ! quelle harmonie ! Osons le dire, quelle symétrie ! En effet, tout dépend maintenant de la libre volonté de Marie : si elle répondait « non » à la proposition venue du ciel (Gabriel, messager divin), la mission de Jean Baptiste n’aurait plus d’objet. A Eve au creux de la vague, chute libre dans l’esclavage, « répond » Marie au sommet de la vague, libre dégagement de l’esclavage. Et là, nous retrouvons la solidarité de nature qui valut pour le péché : toute l’humanité s’écroule en Eve ; voici que Marie parle au nom de toute l’humanité.

Elle dit « oui » à la grâce de Dieu : voilà toute l’humanité ouverte à Celui qui « est » son salut.

Or, Eve a péché dans la virginité. Qu’est-ce à dire ? Eve est transparente à Dieu et par cette transparence elle est pleinement libre. Ce qu’elle fera, en oui ou en non, ce sera un acte total. Elle n’aura pas l’excuse d’un trouble antérieur : elle décide en pleine et entière clarté. L’état de virginité,

c’est l’état de la responsabilité pleine et entière. C’est dans son esprit, et non par un acte charnel, qu’Eve reçoit la semence du diable, la semence du mensonge, dont le fruit sera la mort : c’est un acte spirituel. Ceci, en Eve, est corporellement signifié par le fait qu’au moment du péché, elle ignore l’impératif sexuel. Ses enfants ne naîtront qu’après. Il naîtront dans le péché.

C’est donc dans la virginité que Marie va rétablir ce qu’Eve-vierge a fait déchoir. Transparente à Dieu, Marie est la créature la plus LIBRE qui ait existé depuis la première Eve. Liberté acquise à force de sainteté, acquise dans un cheminement de plusieurs générations qui ont dit « oui » à la grâce sanctifiante. Marie est la plus pleinement et entièrement responsable des créatures, toute prête pour

un acte total : « Que ta volonté soit faite ! » dit-elle à Dieu, au nom de toute la terre. C’est encore dans son esprit, par un acte spirituel répercutant ses effets dans tout l’être, et donc son signe divin dans le corps…, c’est par un acte spirituel qu’en Marie la femme reçoit, cette fois, la semence du Saint-Esprit,

la semence de vérité dont le fruit sera Dieu fait homme. Ceci, en Marie, est corporellement signifié par le fait qu’au moment de son « oui » libérateur, elle n’a enfanté personne dans le péché, ce qu’elle aurait fait en donnant la vie comme on la donne depuis qu’Eve a péché.

Ainsi, Marie est vierge AVANT l’enfantement : sa virginité corporelle « signifie » sa capacité de vraiment répondre par « oui » à Dieu. Elle le peut. Elle le fait. Et voici l’Incarnation.

Le mystère de l’union divinité-humanité:

Supposez que Marie ait enfanté d’une semence humaine : où serait la part évidente de Dieu dans la naissance du Christ qui est homme ET Dieu ? Supposez que Marie ait perdu le « signe » corporel de sa virginité au moment où naquit l’Enfant : où serait l’évidence que l’homme qui vient de naître EST Dieu ?

La négation de la virginité de Marie, y compris celle de sa « signifiante » virginité corporelle, ne voyez-vous pas que c’est la négation du dogme fondamental du christianisme : Jésus vraiment Dieu ET homme ? Cet homme naît à la manière d’un Dieu parce qu’Il EST Dieu. Ainsi la semence vient de Dieu lui-même. Marie conçoit du Saint-Esprit. Vierge AVANT l’enfantement.

Ainsi la mise au monde s’opère par l’action évidente de Dieu. Elle reste vierge, et cela est « signifié » dans son corps. Vierge PENDANT l’enfantement.

Le Saint-Esprit a signé l’Incarnation du Fils de Dieu qui, par Marie, sa Mère au nom de toute l’humanité, devient le Fils de l’homme. Il a « signé » en conservant intacte, charnellement la virginité de l’Epouse inépousée.

Supposez que Marie ait eu des enfants, nés de semence humaine, après la naissance du Christ :

que deviendrait, dans son corps, la « marque » de sa sainteté suréminente ou, si vous voulez, la »signature » du Saint-Esprit ?

« Toi plus vénérable que les Chérubins
et plus glorieuse incomparablement que les Séraphins
qui sans tache enfantas Dieu le Verbe
Toi véritablement la Mère de Dieu nous t’exaltons. »

12 – Les anges

« Dieu créateur du ciel » : le mot CIEL désigne le plan angélique. De même, dans « … et de la terre », le mot TERRE désigne le plan humain.

L’œuvre de Dieu conduit toujours à quelqu’un, jamais seulement à quelque chose. Dans les mondes visibles (la matière, notre espace-temps), ce quelqu’un est l’homme la nature humaine. Dans les mondes invisibles, où cheminent provisoirement nos défunts, ce quelqu’un est l’ange, la nature angélique.

En se dégradant au moyen-âge, après le schisme du XIème siècle, le christianisme occidental a commencé par donner une très mauvaise idée des anges. Un concile du Latran les définit comme de « purs esprits ». Cette définition est fausse et dangereuse.

Fausse : la notion de « pur esprit » ne saurait s’appliquer qu’à Dieu. Si l’ange est incorporel par rapport à l’homme, il cesse de l’être par rapport à Dieu. Le mot MATIÈRE a deux sens : non seulement ce que nous voyons avec nos yeux et touchons avec nos mains, mais aussi nos limitations psychiques, notre « moi ». Par exemple, un homme est d’autant plus matériel qu’il s’enferme dans l’égoïsme, dans le moi-moi-moi, ne pensant qu’à lui, ramenant tout à lui ; il devient au contraire de moins en moins matériel (disons : il se spiritualise de plus en plus)

quand, sortant de la « religion » de lui-même, il s’ouvre aux autres, il vit pour d’autres que lui.

Retenons ces deux sens du mot « matière ». Une fois de plus, en nous souvenant que tout « signifie » nous comprendrons que le volume des choses, leur opacité, leur lourdeur symbolisent en vérité le vide, la carence d’être ; et que, plus un être a de densité, et plus il indique un éloignement de Dieu. C’est d’autant plus compréhensible que pour nous, hommes des proches voisinages de l’an 2000, la science contemporaine voit en toutes choses une formidable dynamique, des vibrations.

Définition dangereuse : elle ouvrit la voie aux philosophies dualistes des temps modernes.

Qu’est-ce qu’une philosophie dualiste ? Une explication du monde par l’agencement de deux opposés : l’esprit et la matière, l’âme et le corps, la pensée et l’étendue Cette explication est fausse dès son principe, car, l’image du Dieu trinitaire plongeant en tous plans et à tous étages de la vie créée, l’univers est marqué par le rythme de trois, et non point par le rythme de deux. Tout est triade : monde spirituel (ou noétique), monde psychique, monde charnel (ou somatique); esprit, âme, corps ; ciel, terre, enfer ; etc.

– o –

Rien n’est impersonnel dans la dynamique de Dieu créateur : telle est la clé qui en nous ouvrant la connaissance de la nature angélique, nous ouvre celle du monde créé dans son royal manteau de mystère.

Ce qu’on appelle une loi mathématique, une loi de la nature : cela désigne un ange, la nature angélique, l’incessante ACTION du ciel habité.

La découverte de l’atome « donnera »-t-elle une amélioration de la vie humaine, comme l’électricité dépassée, la lumière et le chauffage gratuits ? Alors, la liberté de l’homme aura utilisé la dynamique angélique pour le bien de la terre. Cette découverte « donnera »-t-elle l’explosion des bombes ? Alors, la liberté de l’homme aura utilisé la dynamique angélique pour la destruction de la terre.

Tels sont les RAPPORTS entre l’action des hommes et celle des anges. Le ciel transparent à Dieu respecte dangereusement la liberté de l’être humain.

– o –

La théologie des anges (angélologie) nous révèle que le monde créé est beaucoup plus réel et plein d’êtres dans le haut que dans le bas.

Un ange est immense, fût-il le dernier du dernier rang des hiérarchies angéliques. Le rapport entre monde angélique et monde visible est proportionné comme 1 à 9. Ainsi l’on peut dire que les hommes du présent-passé-avenir sont « un dixième », ou « un centième », ou « un millième »… des anges. Autant que l’on mette de 9, il suffit d’ajouter 1 pour compléter le nombre. Chaque ange est NEUF FOIS PLUS GRAND que le monde visible.

Cette grandeur de l’ange vient de ce qu’il est TOTALEMENT au service de Dieu. Un ange n’est jamais un « individu ». Il se définit par rapport à cet Autre que lui, qui est Dieu : il est « personne » au sens total.

Or, qu’est-ce que le monde spirituel ?

Un éternel mouvement vers la personnification. Et qu’est-ce que la personnification ?

Un éternel mouvement d’ouverture vers un autre que soi.

Seigneur notre Dieu, combien grande est Notre Dame la Vierge Marie Mère de Dieu, élevée au-dessus des anges !

– o –

Première approche des mystères célestes : les noms angéliques.

(Notes prises le 4/10/57 au cours de Mgr JEAN)

Raphaël, Michel, Gabriel… Noms qui se terminent par « el ». EL désigne Dieu.

Par exemple, l’ange URIEL. Le rite wisigothique (espagnol dit mozarabe) parle beaucoup des anges, et saint Isidore de Séville dit : « Uriel interpretator ignis Dei. Plus encore le rite celte a parlé des anges : ils sont très familiers à notre piété orthodoxe occidentale qui a donné le mythe du Graal et la Chevalerie. Dans l’Eglise d’Ethiopie, on fête aussi les anges, et la fête de l’ange Uriel tombe le 13 juillet. Uriel signifie : feu divin, lumière divine, unique lumière qui vient de Dieu.

GABRIEL : force de Dieu, puissance de Dieu, colline élevée. C’est l’ange Gabriel qui porte à Marie le message de l’Annonciation.

MICHEL : qui est comme Dieu. Le cri d’humilité devant l’annonce de la kénose du Verbe a situé cet archange au sommet de l’initiation-amour.

RAPHAEL : guérison divine.

RAGUEL : l’unique ami est Dieu.

MATTUEL : tout est suspendu au don de Dieu.

SARAGUEL : la beauté princière n’est que de Dieu.

ZATAEL : l’onction de Dieu.

PHANUEL : la vue véritable ne vient que de Dieu. Etc.

Deuxième approche des mystères célestes : la discrétion angélique.

L’ange est un être totalement transparent à Dieu. Il est un intermédiaire qui ne se place pas « entre »

Dieu et l’homme, mais comme une glace où nous voyons se refléter la volonté divine. L’ange est en éternel service. Il ne revendique pas qu’on le serve.

Ange = perfection de la création par abnégation totale de soi au service des autres. (Or une créature humaine, la seule Vierge Marie, Mère de Dieu, s’est ainsi élevée, non par elle-même mais par humilité et par grâce magnifiante, au-dessus des anges eux-mêmes).

Prudente, l’Eglise a voulu éviter que le culte des anges ne tende pas à voiler ou à remplacer le culte de Dieu. Concile de Laodicée : les anges ne se nomment pas, pour éviter qu’on hypertrophie le culte des anges.

Le mouvement de la nature spirituelle n’est pas : moi. Il est : toi !

– o –

Troisième approche des mystères célestes : la hiérarchie angélique.

La hiérarchie des anges nous est donnée DANS la Tradition Vivante.

L’angélologie nous rappelle que tout est HIÉRARCHIE dans la création de Dieu. La dynamique spirituelle, c’est : monter et descendre. Kénose par amour, ascension par grâce. « Ayant quitté Bersabée, Jacob partit pour Harân. Il arriva d’aventure en un certain lieu où il passa la nuit. Le soleil s’était couché, et Jacob prit une des pierres du lieu, il la mit sous sa tête et il s’endormit. Il eut un songe : voilà qu’une échelle était plantée en terre. Son sommet atteignait le ciel, et des anges de Dieu montaient et descendaient. L’échelle de Jacob (Genèse 28,10-12)

« Si donc, mes frères, nous voulons atteindre au sommet de l’humilité parfaite, et parveni rapidement à cette grandeur céleste, à laquelle on monte par l’abaissement dans la vie présente, il faut, par l’ascension même de nos actions gravir cette échelle qui apparut en songe à Jacob. Il voyait des anges descendre et monter. Cette descente et cette montée assurément ne signifient pas autre chose sinon que l’on descend par l’élèvement et que l’on monte par l’humilité. L’échelle en question, c’est notre vie en ce monde, que le Seigneur dresse vers le ciel si notre cœur s’humilie. Les deux côtés de cette échelle figurent notre corps et notre âme. Sur ces côtés, l’appel divin a disposé divers échelons d’humilité et de perfection à gravir. » Commentaire de saint Benoît de Nurcie (Règle des moines, chapitre 7, 2 )

La plus haute révélation que Dieu ait donné à ses créatures angéliques et humain c’est l’Incarnation de son Fils coéternel.

Cette incarnation est une kénose, c’est à dire une descente de Dieu, un abaissement volontaire, un dépouillement de sa gloire. C’est le cri divin dominant quand, criant son amour, Dieu VEUT être entendu. Ainsi, dans le ciel, monde qui nous est provisoirement invisible, s’étagent les degrés initiatiques par lesquels on accède a l’amour total d’un Dieu qui s’abaisse en s’incarnant. Tel est le « motif » hiérarchique des NEUF chœurs angéliques.

NEUF = trois étages de TROIS = la divine Trinité glorifiée dans les créatures du ciel.

TRIADE SUPRÊME
IMMÉDIATE PROXIMITÉ DE DIEU
SEULE MARIE EST « AU-DESSUS »

SÉRAPHINS

les plus hauts initiés de l’amour de Dieu

CHÉRUBINS

les plus hauts initiés à la connaissance des mondes créés

TRÔNES

les plus hauts initiés à l’obéissance de Dieu

au sommet, le CHEF : l’archange Michel, devenu le plus élevé des Séraphins, dirige le combat des armées célestescontre les ennemis de la kénose de Dieu (monde satanique, ou angélique déchu)

TRIADE INTERMÉDIAIRE
TRAVAIL ET LUTTE
A L’ÉCHELLE COSMIQUE

DOMINATIONS la volonté de Dieu, vraie LOI DE LA NATURE

VERTUS

PUISSANCES

_

TRIADE PROCHE-TERRESTRE

EN CONTACT AVEC L’ÊTRE HUMAIN

PRINCIPAUTÉS les courants de pensée, les idées, la véhiculation des influences,

ARCHANGES la protection des cités et de tout élément,

ANGES et les messagers divins.

ALORS VIENT L’HOMME

CRÉÉ PRÊTRE, PROPHÈTE ET ROI

ET LA TRIADE TERRESTRE
ANIMAL-VÉGÉTAL-MINÉRAL

12- Ciel, terre et enfer.

Il s’agit ici d’éclairer ces trois notions. La triade ciel-terre-enfer répond à celle de l’homme : esprit (noùs), âme (psychè), corps (soma). Mais l’enfer est au-dessous du corps et de la matière, il est en deçà.

La création en sa totalité ne possède pas l’être. Cela veut dire que, par elle-même, par son propre vouloir et par ses propres forces, elle ne peut « se faire être » ni même demeurer existante. Elle est en tant que

Dieu le veut.

De sorte que, tout ensemble, elle est et elle n’est pas. Elle est relativement, c’est à dire dans « le plus ou moins ».

Enfer, terre, ciel marquent une hiérarchie vers l’être.

L’enfer, c’est le non-existant qui existe : le non-être avec sa désespérance. Ecoutons le saint évêque Grégoire de Nysse :

« …une grande affinité s’est établie entre l’âme et le mal, et voici la conséquence : l’incision de la verrue cause une vive douleur à la surface du corps, car ce qui s’est développé dans la nature, contre la nature elle-même, tient à la substance par une sorte de sympathie. Il se produit un mélange inattendu de l’élément étranger avec notre propre être ainsi, la séparation de l’élément contre-nature entraîne une sensation douloureuse et aiguë. De même aussi, quant l’âme s’exténue et se consume dans les reproches que lui attire sa faute, c’est à cause de son union profonde avec le mal que, nécessairement, doit se présenter un cortège de douleurs indicibles et inexprimables, dont la description est aussi impossible que celle des biens que nous espérons.

Ni les uns ni les autres, en effet, ne se prêtent aux moyens d’expression dont disposent notre langage et notre pensée. »

La terre est, par excellence, le lieu de rencontre de l’être avec le non-être. C’est pour cette raison que nous vivons dans un monde matériel, et que Dieu nous donne les moyens d’y vivre spirituellement.

Et là, nous pouvons saisir ce qu’est, en vérité, le ciel.

Pour le comprendre, il faut savoir ce qui suit :

1 – Plus un être est immatériel, et plus il se trouve en avant dans l’être.

C’est par augmentation du vide que l’esprit se matérialise. Plus une réalité est matérielle, et plus elle est vide d’être, proche du non-être et de l’enfer.

2 – Le « péril » de la terre (péril auquel nous avons à faire face en demandant, par prière constante, l’aide de Dieu), c’est l’illusion : les choses sont autres que nous croyons qu’elles sont. Par exemple : les objets matériels (le vide) nous semblent plus « évidents » que les réalités spirituelles (pleines d’être) et que Dieu Lui-même (la source vivante de l’être).

Par l’illusion, nous avons un pied et demi dans l’enfer.

3 – Progresser dans l’être, c’est se spiritualiser et s’intérioriser. Autrement dit : se faire CIEL, ou spirituel, par la grâce de Dieu.

13 – La prière

Prier, c’est parler avec Dieu. L’envie de prier apparaît quand on a envie de dire quelque chose à Dieu. On a envie de lui dire quelque chose quand on a quelque chose à lui dire.

Trop souvent, en Occident depuis le schisme, on fait du « psychologisme » en croyant prier : on s’enfonce dans un monologue psychique, on se parle à soi-même en mettant, comme une ombre à un très lointain bout d’une table, une abstraction non concernée qu’on appelle Dieu. On ne prie pas

Dieu, on prie à propos de Dieu. Ce monde psychique est celui que les Saintes Ecritures et toute la Tradition quali­fient de charnel : il s’enferme dans ses images, dans ses désirs, dans ses considérations, et on n’en sort pas. Pis encore : on y fait entrer le prétexte Dieu.

Pour POUVOIR prier, il importe donc, une fois encore, de savoir :

– que l’esprit se matérialise par augmentation du vide, en se bourrant des images tirées du vide matériel ;

– que l’illusion renverse le monde des évidences, en « justifiant » le vide à coups de « raisons » qui tournent en rond ;

– qu’avec le grâce de Dieu, l’homme peut sortir de l’illusion et du vide en se spiritualisant, en s’intériorisant, et, de ce fait, en progressant dans l’être.

Bien sûr, il faut prier Dieu qu’Il nous accorde en grâce l’intelligence de ce qu’Il dit à l’Eglise et dans l’Eglise (la Tradition avec les dogmes et la liturgie) Mais il faut cette vérité dogmatique,

il faut la vivre dans l’action liturgique de l’Eglise, si l’on veut pouvoir prier en vérité. C’est-à-dire : apprendre à se nourrir et a respirer dans les trois plans de l’être qui sont le corps, l’âme et l’esprit. Car la prière, c’est l’esprit qui se nourrit de Dieu et qui le respire.

Et alors, parce que la prière a fait son œuvre, parce qu’elle a rétabli l’ordre véritable, l’esprit nourrit l’âme, celle-ci nourrit le corps, celui-ci nourrit le cosmos. Nourrir, ici, veut dire : communiquer la vie, dont la source est Dieu.

« …lorsqu’on demeure avec patience dans la prière, on s’aperçoit qu’il est impossible d’épingler ses sentiments, et que cette jeune fille lunatique et capricieuse qu’est notre « moi », nos « moi » plus exactement, perd peu à peu son autorité. Derrière sa tyrannie, nous la voyons telle qu’elle est. « La prière situe l’homme dans la conscience brutale des choses objectives.

Mgr Jean de Saint Denis

Objectivement, nous ne pouvons, en priant, que retrouver nos dimensions normales, notre véritable stature. Nous ne sommes rien, nous ne « sommes » que relativement; Dieu est tout, Il « est » absolument. Alors, monte de tout le peu que nous sommes, la glorification, ou doxologie. Orthodoxie signifie : juste doxologie. Cri d’amour à la divine Trinité !

14 – Les Saints.

Nous vouons un culte aux hommes sanctifiés (les bienheureux, ou les Saints) parce qu’ils nous ont précédés et que, en nous précédant, ils nous ont montré le chemin. Un Saint est celui qui se nourrit de Dieu et le respire, enseignait Mgr Jean. Et il disait : « Avant tout, guérissons l’esprit en l’entourant de l’hygiène convenable. Cette hygiène vitale, c’est Dieu. Ou, comme dit la Genèse, l’Arbre de Vie. Le contact avec Dieu est la prière. Voici pourquoi les deux formes de prière alimentant l’esprit sont la prière-nourriture et la prière-respiration.

La raison de la prière, avant de transformer le monde, est de ramener l’homme à son équilibre premier, celui qui lui fut enlevé par le péché. « 

Prière-nourriture. « …un être dont le chant intérieur est aussi bien réglé que les repas, selon les heures, se construit peu à peu une santé spirituelle.

Prière-respiration. « … elle doit être permanente. Nous respirons dans le sommeil aussi bien qu’à l’état de veille. Elle est, en conséquence, perpétuelle ininterrompue, que nous soyons conscients ou inconscients. »

« La pointe divine de l’esprit plonge en Dieu.

« La prière-respiration vit à l’air pur. Avant d’y entrer, écartez totalement toute pensée étroite, micro-psychique comme disent les Pères. Si votre Dieu est mesquin, votre prière intérieure est dangereuse. Placez votre esprit face à une conception espacée de Dieu.

Plus il sera immense, bon, large, plus votre prière perpétuelle portera de fruits savoureux.

« Coupe, lotus, tulipe, rose, quelque chose qui s’ouvre pour accueillir et s’alimenter. Vos gestes, votre attitude ne doivent pas vous demander plus d’efforts que d’être bien assis dans un banquet.

« Acceptez et gardez. La Vierge conservait en son cœur les précieuses paroles de son Fils. Le Saint est cet homme qui prie le Père, dans le Saint Esprit, par le Fils. Sa vie toute entière n’a qu’un rythme : celui de la divine Trinité.

Pour bien comprendre la sainteté que Dieu donne par sa grâce à l’homme dont la vie est prière, il importe de sortir de la « morale ». Il ne s’agit pas d’acquérir des qualités ou des mérites, mais la qualité retrouvée dans le choix délibéré et définitif de l’amour de Dieu. « La loi spirituelle », disait encore Mgr Jean, diffère, sans la contredire, de la loi morale. Elle la dépasse et déplace même les problèmes. Ainsi, des action des états indifférents ou neutres moralement, sont mortels parfois spirituellement. »

15 – Les icônes

Le péché originel a tout renversé : la matière, qui est vide, devient à nos yeux, plus « évidente » que les réalités spirituelles, pleines d’être, et que Dieu lui-même, source vivante de l’être. Dans le monde du péché, les images mentent : elles nour­rissent l’illusion, elles nous emportent vers toujours plus de matérialité, c’est à dire vers toujours plus de vide.

L’icône, c’est l’image qui ne ment plus.

L’icône est l’image qui nourrit la prière, nous emportant vers toujours plus de spiritualité, c’est à dire vers toujours plus d’être et de vie.

En Christ, icône du Père, la nature divine n’est pas devenue celle de la chair. Mais le Verbe, qui est Dieu, est devenu chair, est devenu totalement homme sans changement de sa nature divine. La chair est devenue Verbe, sans quitter ce qu’elle était. Ainsi la nature humaine, le corps et avec lui toute la matière cosmique, toute la création sensible : tout cela monte vers Dieu, progresse dans l’être par déification. L’icône est l’image déifiée déifiante.

Elle est PRÉSENCE d’un Dieu qui traverse tout pour atteindre notre regard et parler au fond de notre cœur.

L’icône ne représente pas la divinité immatérielle et incorporelle. Mais elle clame qu’aujourd’hui la divinité s’est mêlée, sans confusion, à notre nature. Tel un remède de salut et de vie. Et voilà notre nature véritablement glorifiée et transformée pour l’immortalité. C’est cela que « signifie » l’icône.

« L’icône, enseignait saint Jean Damascène : « l’icône est ressemblance, modèle, représentation montrant par elle-même celui dont elle est l’icône. Elle révèle et montre ce que l’on ne peut pas voir : « … ainsi l’homme n’a pas une connaissance immédiate de l’invisible, le psychisme étant recouvert par le corporel, ni de l’avenir, ni de ce qui est loin de lui ou absent, car il est circonscrit dans le temps et l’espace. L’icône est saisie par l’esprit pour guider dans la connaissance la manifestation et la démonstration de ce qui est voilé. »

Saint Dean Damascène disait encore :

« Les anges n’ont pas participé ni communié à la nature divine, mais à l’énergie, c’est à dire à la grâce de Dieu. Les hommes, eux, participent et communient à la nature divine, prenant le Saint Corps du Christ et buvant son Sang. Ils sont unis à l’hypostase de la divinité.

Quand nous prenons le Corps du Christ, les deux natures sont unies selon l’hypostase, sans séparation. Nous participons aux deux natures, à celle du corps corporellement, à la nature divine spirituellement. Ou plutôt à toutes les deux, avec les deux… »

Ainsi, vénérant les Saints représentés sur les images saintes dans la lumière de Dieu qu’on ne saurait ni dessiner ni peindre, le peuple orthodoxe pénètre dès aujourd’hui, par ses icônes, dans le monde transfiguré.

16 – Les sacrements.

Deux termes désignent ces actes divins qui nous libèrent par la grâce. Ou bien : sacrement, ou bien mystère. Pas plus qu’on ne définit Dieu, on ne saurait réduire en formules cette permanente insufflation de vie établie dans l’Eglise : initiation chrétienne, sanctification des engagements essentiels, absolution des péchés, onction aux malades. Au centre et au sommet : l’eucharistie, la communion au Corps et au Sang, présence réelle du Christ.

Les sacrements culminent dans le mystère eucharistique, comme les périodes et fêtes de ‘année liturgique culminent dans la lumière joyeuse de Pâques.

Parce qu’elle est l’Incarnation du Verbe continuée dans l’histoire et dans toute les profondeur s de l’existence humaine, l’Eglise dispense en toutes circonstances la force spirituelle. Le réveil orthodoxe rappelle aux chrétiens d’Occident que toute la vie est sanctifiée : la conception de l’enfant, sa naissance et l’imposition de son nom, les relevailles, la bénédiction de la maison, bref tout ce qui arrive à l’homme du fait de sa condition humaine. Ainsi, les sacrements ne sont pas comme des tiroirs qu’on ouvrirait en certaines circonstances et qu’on refermerait ensuite pour penser à autre chose. Toute la vie chrétienne, à chaque instant, baigne dans le sacrement, c’est à dire dans la dynamique secourable du mystère divin manifesté.

Parce que l’œuvre du salut embrasse tout le cosmos, les éléments matériels sanctifiés, participent, dans les sacrements, à l’œuvre du salut :

– l’eau, dans le baptême par lequel un être « revêt le Christ »,

– Les essences odoriférantes du Saint Chrême, dans la chrismation par laquelle, marqué du sceau indélébile du don du Saint Esprit, le nouvel incorporé prend sa place et ses responsabilités au sein du peuple royal,

– le pain et le vin mêlé d’eau, qui deviennent présence réelle du Corps et du Sang dans l’eucharistie, sacrement des sacrements,

– l’huile dans l’onction des malades.

C’est le Saint Esprit qui « fait » l’efficacité de tout sacrement. Car tout est épiclèse dans l’Eglise de Dieu.

ÉPICLÈSE = ce n’est pas parce que le prêtre a dit « ceci est mon Corps…, ceci est mon Sang… », ce n’est pas PAR l’action des paroles du prêtre que le pain devient Corps et que le vin devient Sang.

Mais cette transformation, le Saint Esprit l’opère Lui-même, de par sa puissance divine, après qu’ayant prononcé ces mots le prêtre L’appelle et s’éloigne en reculant de l’autel afin que soit clairement signifiée l’action décisive de la divinité.

C’est encore le Saint Esprit qui agit dans le baptême, la chrismation, la communion, l’absolution des péchés, le mariage, l’ordination, l’onction des malades. Toute entière, l’Eglise est épiclèse.

L’INITIATION CHRÉTIENNE est donnée sur le critère de la confession catholique orthodoxe de la foi, par baptême, chrismation et communion eucharistique, au cours de la même cérémonie d’incorporation. Baptême et chrismation ne sont conférés qu’une fois. La communion eucharistique devrait pouvoir être quotidienne : elle apporte le « pain super-substantiel » et, par elle, on boit à la source immortelle.

Quand existe UNE FAMILLE ORTHODOXE capable de s’engager au nom de l’enfant, l’Eglise admet les nourrissons à l’initiation, et ils communient, à chaque liturgie, avant les personnes d’âge adulte. Tout chrétien communie au Corps et au Sang.

LE SACREMENT DE PÉNITENCE, auquel on doit très fréquemment recourir dès le catéchuménat des adultes et pendant toute la vie, consiste en une thérapeutique de l’âme confession des péchés, absolution donnée par le prêtre en conséquence du pouvoir des clés (lier et délier).

Dans L’ONCTION DES MALADES est demandée la guérison de l’esprit, de l’âme et du corps, si telle est la sainte et sanctifiante volonté de Dieu.

LA SANCTIFICATION DES ENGAGEMENTS ESSENTIELS :

Fiançailles (ou subbarrhation) et mariage – l’homme s’unit à la femme dans le Saint Esprit comme, dans le Saint Esprit, le Christ s’est uni à l’Eglise.

Ordinations (portier, lecteur, acolyte, sous-diacre, diacre, prêtre, chirotonie épiscopale) – le peuple royal, dont tous les membres sont prêtres du fait de leur baptême et chrismation, délègue au sanctuaire ceux qui, EN SON NOM, présideront à la liturgie eucharistique, absolveront les péchés, béniront le mariage, oindront les malades… ; et, pour admettre à ce sacerdoce de « quelques uns » au nom du sacerdoce « de tous » qui découle par grâce du sacerdoce « unique » du Christ, les évêques, successeurs des apôtres, ayant eux-mêmes élu l’ordinant, lui imposeront les mains. Marié avant son ordination au sous-diaconat, un prêtre demeure dans la vie conjugale d’autres, ayant préféré la voie monastique, garderont le célibat.

Toute la vie chrétienne, nous l’avons dit, baigne à chaque instant dans le sacrement, c’est à dire dans la dynamique secourable du mystère divin manifesté.

Une famille chrétienne orthodoxe détient l’eau bénite, qu’on emporte chez soi après la bénédiction des eaux faite au jour glorieux de la Théophanie, et le sel béni : ces humbles créatures de l’eau et du sel, par l’action du Saint Esprit, nous aident efficacement à lutter contre les assauts du malin. Elles fortifient notre prière en y faisant participer (et en quelque sorte concélébrer) le cosmos sanctifié.

Ainsi, du suprême degré initiatique du ciel (l’ordre séraphique) jusqu’aux éléments de la matière, en passant par l’homme qui exalte en lui l’image de Dieu par sa prière, TOUTE LA CRÉATION participe à cette guerre essentielle qui ne s’achè­vera qu’à la parousie, ou retour en gloire du Christ Vainqueur. Prions donc dans l’enthousiasme, de toute la force de notre joie.

Et que tout père et toute mère bénissent leurs enfants et les mets posés sur la table familiale.

Car c’est dans la dynamique du mystère d’amour que les humains font ou refont UN PEUPLE.

« Il a fait de nous des rois et des prêtres,

« et nous règnerons avec LUI sur la terre… »

L’EGLISE

17 – L’Eglise, Mère des vivants

18 – Unité dans la diversité

19 – Le mystère de la lumière et du sel

« Le Vendredi Saint, lorsque le deuxième Adam s’endormit sur la Croix, la nouvelle Eve-Eglis sortit de son côté sous forme de sang et d’eau : l’eau du baptême au nom de la. Trinité, le sang de la coupe eucharistique. Le Vendredi Saint, l’Eglise sortit du côté du Christ percé par la lance du soldat romain Longin.

Le jour de la Pentecôte, la nouvelle Eve-Eglise ayant reçu le Souffle de la vie éternelle, la connaissance du Saint Esprit, se dressa devant le monde hostile, achevée, parfaite, pure, belle :

femme forte par la grâce, consciente de sa mission universelle.

Le Vendredi Saint, elle sort toute entière du Christ comme la première Eve qui n’a d’autre origine qu’Adam. Elle ne prend rien au monde, redevable uniquement à son Chef. Chaque parcelle de son être est tirée du Crucifié, du Verbe fait chair, mais c’est la lance d’un soldat romain qui ouvre le côté du Christ. Le soldat romain est le représentant de l’empire, de César, du monde politique. Cette lance de César apportera, par le sang des martyrs, le témoignage véridique à travers les siècles, de l’Eglise et du Christ crucifié, du sommeil du Deuxième Adam, de la naissance de la nouvelle Eve, de la distinction dans l’unité de l’Epoux et de l’Epouse.

A la glorieuse Résurrection, à la puissante Pentecôte, César est absent. Le Feu de la divinité descendant sur chaque membre de l’Eglise tombe du ciel à l’intérieur du cénacle, sans que les agitations extérieures de l’empire se doutent de son apparition. Mais bientôt le monde se heurtera à la prédication enflammée des Apôtres, lancée dans les peuples endormis par l’ignorance.

Et alors apparaîtra la triple attitude du monde vis-à-vis de l’Eglise : il coopère avec elle, il l’ignore, il la persécute. »

Mgr Jean de Saint Denis (1905-1970) en mai 1958.

1 – L’Eglise Mère des vivants

L’Eglise ne se réduit pas à cette société visible inscrite dans l’histoire, tantôt solide et influente et tantôt persécutée. De même que le Verbe divin contient toutes choses et devint cependant le Christ historique, de même l’Eglise, qui contient les univers, est devenue cette institution historique fondée par le Christ, illuminée par le Saint Esprit, organisée par les apôtres.

L’Eglise contient le monde comme une mère son enfant. Enceinte de l’humanité à venir en avant de l’histoire, ensemencée par l’Esprit Saint comme le fut Marie la Vierge, elle est mère des vivants.

Elle accouche le monde transfiguré, celui dont les icônes constituent la déjà présence. Le monde réel croit en elle comme un fœtus dans les entrailles maternelles.

Sa nature est essentiellement sacramentelle. Cela veut clairement dire qu’elle NOURRIT toute l’humanité-embryon, qu’elle DISPENSE la force divine par laquelle le genre humain pourra se réveiller au Huitième jour dans son identité véritable.

Il y a « l’Eglise » quelque part parce que, là, il y a l’eucharistie, sacrement absolument « central », un peuple baptisé et oint du saint-chrême pour recevoir l’eucharistie, un évêque pour célébrer la liturgie au nom et à la tête de ce peuple.

Le mystère de l’Eglise est celui de l’union divinité-humanité : les deux natures du Christ. L’Eglise est théandrique (= divino-humaine) : Dieu ET nous, inséparablement « Je crois en l’Eglise une, sainte, catholique et apostolique ».

UNE – Communion sacramentelle ordonnée à la déification des personnes. Cette unité s’attache à l’épiclèse : tout le peuple de Dieu prie pour que soit envoyé l’Esprit Saint qui nous manifeste le Christ.

SAINTE – En elle, nous croissons dans la Vérité, inséparable d’un croissant amour. Cet amour, qui est « un fruit de l’esprit », ne provient pas de nous, mais de Dieu. Et, pour cette raison, « il ne périt pas ».

CATHOLIQUE – (Du grec cata-olon = plénitude, intégralité). Dans sa pensée, son âme et ses actions, l’Eglise, dans l’intégrité de sa foi, embrasse tout : les univers visibles et invisibles, le ciel, la terre et l’enfer.

APOSTOLIQUE – Non seulement elle fut fondée par les apôtres, mais elle garde leur esprit : non seulement par un lien avec leur pensée, mais par un lien, que le Saint Esprit fait demeurer vivant, avec leurs personnes. Lien indestructible avec les Père qui nous ont engendrés en Christ.

Etant une, sainte, catholique et apostolique, l’Eglise est :

ORTHODOXE (Ortho = juste, droit ; doxa = glorification, doxologie). Or, la glorification est l’aboutissement de la pensée : l’Eglise qui embrasse tout du fait qu’elle est CATHOLIQUE, creuse tout du fait qu’elle est ORTHODOXE. Catholique = une barre horizontale, visant la création. Orthodoxe = une barre verticale, visant la divinité Ce qui forme la CROIX du salut.

2 – Unité dans la diversité

L’Eglise orthodoxe n’admet pas la doctrine romaine à propos de l’Eglise :

1 – Il n’existe aucun évêque qui soit « le chef » des autres évêques, ou « plus évêque » qu’eux.

Tous les évêques sont égaux entre eux dans l’épiscopat. Pas plus qu’un autre, l’évêque-pape de Rome n’est le « chef » de l’Eglise. Mais seulement celui de l’Eglise de Rome dont le territoire patriarcal se limite, depuis les temps les plus anciens, à la ville et à la campagne romaines (même pas à le siège de Milan, par exemple, n’a jamais été originellement en dépendance de Rome).

2 – Il n’existe aucun évêque qui puisse se dire « le successeur de Pierre » à un titre particulier. Tout évêque succède à tous les apôtres (à Pierre aussi bien qu’à Jean, Jacques, Luc, Matthieu, Marc, Paul etc.), jamais à un seul.

Et d’ailleurs, aucun apôtre ne fut l’évêque d’un lieu quelconque : les apôtres « n’étaient » pas des évêques. ils « faisaient » des évêques, lesquels étaient leurs successeurs. Par exemple, le 1er évêque de Rome ne fut point l’apôtre Pierre (apôtre et non évêque), mais Linus, prêtre de Paul ainsi que Clet son successeur et ordonné vers 61 par LES apôtres présents à Rome ; à Linus et à Clet succéda Clément, prêtre de Pierre. Tout comme Clément et les suivants, tout évêque- pape de Rome, étant un de ces suivants, succède aux premiers évêques et non pas spécialement à l’un des apôtres présents à Rome ; il est « le successeur » de l’évêque saint Linus, et pas du tout celui de l’apôtre Pierre à un titre particulier. La première Eglise dirigée par l’apôtre Pierre fut Antioche, dont le martyr Ignace devint le premier évêque, et non point Rome où, notons-le, prévalus l’influence de Paul.

3 – Aucun apôtre, et pas plus Pierre qu’un autre, ne fut le « chef » de ses collègues. Tous les apôtres étaient égaux dans le collège apostolique. Par exemple, qui présida, en 49, le proto-concile de Jérusalem ? Non point Pierre, mais Jacques, parce que celui-ci gouvernait l’Eglise de Jérusalem dans la période pré-épiscopale où se tenait le concile. On vit Paul réprimander Pierre, et ce dernier s’incliner parce que Paul avait effectivement raison. En eût-il été ainsi avec un « vicaire du Christ », infaillible par surcroît ?

Pas plus que Jérusalem, Antioche ou Ephèse, Rome ne fut « la ville apostolique »; ces villes furent apostoliques avant elle ou en même temps. Elle ne les régentait pas Il en alla ainsi pendant 9 siècles jusqu’à ce que, influencés par des motifs politiques venus du pouvoir temporel occidental, les évêques romains en vinssent à inventer de toutes pièces leur doctrine hérétique de la prétendue « suprématie du siège de Pierre ».

Etant faite pour communiquer la Divine Trinité à la création, l’Eglise est naturellement à l’image de la Divine Trinité. Son organisation en découle.

Le mystère trinitaire, UN seul Dieu et TROIS Personnes, nous révèle en effet l’harmonie de l’UN et du MULTIPLE. Cette harmonie, question insoluble pour l’homme dans le péché, est réalisée en Dieu et, par Dieu, elle devient possible à l’homme dans la grâce. En termes plus humains et faciles à comprendre, cela veut dire que, dans un monde rétabli dans sa ressemblance à Dieu-Trinité, chacun est pleinement soi-même sans contraindre les autres à se modeler sur lui, tous font ensemble, une unité vivante sans tomber dans la grisaille du comme-tout-le-monde.

Découlant du dogme de la Trinité, le vrai « génie » du christianisme consiste en ce que, par l’ouverture de chacun à Dieu et à son prochain, plus chacun est pleinement « Je » ou PERSONNE, et mieux se porte le « nous tous » ou NATURE HUMAINE. L’Eglise c’est cette anticipation du Royaume où l’humanité devient UNE parce que PLUSIEURS font UN. « Une » dans et par le multiple. « Une » dans et par la diversité.

Voilà pourquoi, au lieu d’un organisme centralisé standardisé, l’Eglise orthodoxe présente opiniâtrement ce phénomène naturel : des Eglises locales autonomes et chacune originale, dont l’UNITÉ vient de ce qu’elles restent invariablement d’ACCORD sur le dogme, sur les sacrements, sur les règles générales. Des Eglises locales qui forment l’Eglise du fait que l’une se reconnaît dans toutes les autres et que toutes les autres se reconnaissent en une seule, qu’elle soit à Antioche, à Athènes, à Helsinki, à Moscou, à Bucarest, à New York, à Tokyo ou à Paris. « Se reconnaître », ici veut dire : retrouver, de manière évidente, ici ou ailleurs, la plénitude de l’Eglise universelle, car une Eglise locale, ce n’est pas une « partie » ou un morceau de l’Eglise universelle qui serait telle parce que totale dans l’espace…, non, une Eglise locale c’est toute l’Eglise universelle qui, avec son originalité bien à elle (tel peuple, telle langue, telle culture, telle histoire…), se tient ici, là ou ailleurs.

Or, ET C’EST LA CLÉ DE TOUTE L’ECCLÉSIOLOGIE ORTHODOXE, il en va ainsi en conséquence directe du dogme trinitaire : PARCE QUE, dans la plénière harmonie en Dieu de l’UN et du MULTIPLE, le Fils est engendré du Père, le Saint-Esprit procède du Père. Cela explique « les différences » entre le contexte ecclésial romain et le nôtre ayant fabriqué par la suite un autre dogme trinitaire, ayant altéré le dogme trinitaire vraiment catholique, avec son « filioque » (Saint-Esprit procédant du Père « et du Fils », donc diminué et devenu subalterne), l’Eglise romaine n’a pu demeurer une Eglise locale à l’état normal et s’est enfoncée dans l’anomalie du centralisme par voie d’autorité extérieure. Une Eglise vaut ce que vaut sa confession trinitaire.

Répétons-le : chacune des Eglises est TOUTE L’ÉGLISE, elle est pleinement l’Eglise universelle parce qu’elle a la plénitude de la vie sacramentelle.

Unité dans la diversité:

Ce qui se voit signifié dans la COMMUNION. Russes, Américains, Syriaques ou Chinois ou Français, les orthodoxes SONT DE LA MÊME ÉGLISE du fait qu’ils participent à LA MÊME EUCHARISTIE, dans la lumière des mêmes dogmes, dans la dynamique des mêmes canons généraux, bref DANS LA MÊME TRADITION VIVANTE INALTÉRÉE.

Nous avons dit : D’ACCORD. De la loi d’accord, ou loi d’harmonie, ou conciliarité découle que tout problème s’étudie « ensemble », entre tous, entre tous venus de partout avec chacun sa personnalité pas-comme-tout-le-monde, entre ceux qui sont UN et qui sont DIFFÉRENTS… qu’ils sont DIFFÉRENTS…, et tout ce qui sera et qui sont UN parce formulé, décidé, promulgué, ce sera :

cette uni-multiplicité humaine EN ACCORD avec le Saint-Esprit Lui-même EN ACCORD ÉTERNEL avec le Père et le Fils dans l’UN indivisible des TROIS Personnes divines. Nous venons là de définir le concile.

L’Eglise est CONCILIAIRE parce que sa loi, qui découle du dogme trinitaire, est celle de l’accord et de l’harmonie.

Aucun n’impose son point de vue aux autres. Tout autoritarisme devient impossible et il en va de même, par exemple, du cléricalisme. Tous constatent qu’ils se reconnaissent d’accord, et entre eux, et avec Dieu. L’autorité n’a pas été suspendue SUR eux comme une épée sur la tête de Damoclès : elle circule DANS le peuple baptisé comme le sang à chaque instant plus riche dans un corps qui ne demande qu’à vivre. Et quand il devient évident que « le Saint-Esprit et nous, unanimement, confessons… » alors, ce qui suivra ces mots-clés, ce sera : le DOGME.

Il en ira de même quand il s’agira de préciser la loi pratique d’harmonie dans le corps historique de l’Eglise de Dieu. Et alors, ce sera : le CANON.

Pour aider à la compréhension de ces choses, prenons une image.

Vous savez que les sept couleurs séparées par le prisme, les sept couleurs de l’arc-en-ciel fondues donnent le blanc. Eh bien, supposez que vous unissiez un bleu délavé, un jaune décoloré, un rouge baveux, etc. vous n’obtiendrez rien de vraiment blanc, mais une espèce de gris sale. Au contraire, avec un bleu totalement bleu, un jaune intensément jaune, un rouge éperdument rouge… vous obtiendrez le blanc éclatant.

Cela aide à saisir que, dans l’Eglise orthodoxe, s’agissant des personnes particulières ou des groupes, la pleine personnalité, dans sa prodigieuse diversité, fait l’unité authentique et vivante.

3 – Le mystère de la lumière et du sel – (Matthieu 5, 13-16) :

« Vous êtes le SEL de la terre. Mais si le sel perd sa saveur, avec quoi salera-t-on la terre ? Il ne serait plus bon qu’à être jeté dehors et foulé aux pieds par les hommes.

Vous êtes la LUMIÈRE du monde. Une ville située sur une montagne ne peut rester cachée. On n’allume pas une lampe pour la mettre sous le boisseau, mais bien sur le lampadaire, où elle brille pour tous ceux qui sont dans la maison. Ainsi, votre LUMIÈRE brillera aux yeux des hommes

pour que, voyant vos œuvres bonnes, ils en rendent gloire à votre Père qui est dans les cieux. »

La LUMIÈRE – Ce monde, dont Satan devint le prince, se meut en direction du non-être. Son itinéraire de péché, dynamique perturbée, évoque les ténèbres : opacité, lourdeur esprit tenu captif, morcellement des êtres, recul par rapport au plan vital.

C’est un monde à l’opposé de l’intelligence et du sens de l’être. Tous regards de l’esprit, de l’âme et du corps y tendent à plonger dans un vide matériel. Cela donne : opacité contagieuse, lourdeur sans cesse accrue, non conscience du réel vrai. On baigne dans le faux-semblant, l’illusion, la fausse évidence, la fausse inévidence. Suivant la logique de ce monde, on finit par conclure que l’existence serait absurde. Le désespoir métaphysique apparaît au bout de cette logique.

Symbole de l’INTELLIGENCE, la lumière restitue à l’homme la prise de conscience dont dépend la qualité de son existence. Cette prise de conscience vient de la révélation de la vie en plénitude, elle est le fruit solaire de cette révélation donnée par Dieu-fait-homme. Par cette prise de conscience donc, chaque chose apparaît dans sa réalité : réalité de sa nature, réalité de sa place dans le tout, réalité de sa vocation propre, réalité de ses rapports avec tout ce qui n’est pas elle. Le terme « lumière » met en évidence la dynamique de restitution du réel.

Ce qui est réel, en effet, c’est l’être dans son mouvement de plus-être, c’est la vie AVEC son élan naturel de dilation illimitée. Qui parle de nature (entendons : nature à l’ÉTAT NORMAL), dit :

dilatation du créé en direction de la grâce incréée. Ce qui est réel, ce sont les énergies, créées et incréées, concourant au plus-être, à la vie. Le non-être et la mort, qui existent du fait du péché, sont anti-réels. Par le péché, nous étions DEDANS, nous y plongeons encore du fait que nous somme pécheurs. Le monde du péché est celui de la réalité fausse.

Mais étant en présence et action de la lumière incréée, l’Eglise pose au monde LA question humaine par excellence. Non point comme une curiosité, non point un problème intellectuel ou seulement affectif. L’Eglise pose cette question comme elle doit être posée : problème de vie ou de mort.

Lumière = intelligence dans la grâce = vie éclairée-éclairante.

Le SEL – Dans les ténèbres, dans le non-être, dans l’itinéraire vers la mort, bref dans l’ANTI-RÉÉL, ce qui est d’abord perdu, c’est le sens et le goût de la vie.

Sens de la vie : les vivants se meuvent et se dilatent, par nature, en direction du plus être. Le monde créé tend naturellement vers la grâce incréée.

Goût de la vie : les vivants se meuvent et se dilatent dans l’enthousiasme du plus-être. D’où ce cri sans cesse jaillissant, qui est la DOXOLOGIE : ô Dieu qui est LA vie, gloire à Toi ! Tendant vers la grâce incréée, le monde créé est naturellement (ou, si l’on veut, normalement) un cri de joie, une explosion liturgique aux vibrations toujours nouvelles.

Symbole de la SAGESSE (sophia), le sel restitue à l’homme sa capacité de chois la vie, les moyens divino-humains de parvenir ou de revenir à ce choix, les techniques par lesquelles on atteint le but indiqué par ce choix.

L’Eglise « sale » tout ce qui arrive dans ce monde : les évènements, leurs motifs, leurs liens avec les êtres, leur signification cachée.

Parce qu’elle est par excellence SEL DE LA TERRE , l’Eglise imprime au monde l’élan vital.

« C’est pour que nous restions libres que le Christ nous a libérés.

« Tenez bon, et ne vous remettez pas sous le joug de l’esclavage. »

Galates, 5, 1

PRÉLUDE À L’INITIATION LITURGIQUE

20 – Vous entrez dans l’Eglise

21 – « Debout, soyons attentifs, en silence »

22 – La synaxe des catéchumènes

23 – Le mystère eucharistique

24 – Le cycle liturgique

« Saint Germain, évêque de Paris, né en 498 à Laisy, prêtre en 536, puis évêque…, né au ciel le 28 mai 576 à l’âge de 80 ans… saint Germain avait un véritable génie de la liturgie, et saint Fortunat nous décrit avec lyrisme la splendeur de la liturgie célébrée à l’église saint Etienne, élevée en 375 dans l’île de la Cité sous l’épiscopat de l’évêque Massus, « ainsi que dans l’église sainte Marie, construite sous saint Germain grâce aux libéralités du roi. Fortunat appelle l’évêque Germain, l’Aaron de l’Eglise de France. Il existe encore, à la bibliothèque d’Autun, un précieux manuscrit latin du IXème siècle, recopié directement sur un texte plus ancien, qui commence ainsi : « Germanicus episcopus Parisius scripsit de missa ». C’est donc un traité sur la messe.

Ce document connu sous le nom de « Lettres de Saint Germain », comprend deux lettres soudées en un seul texte… Ces précieuses lettres ont servi aux travaux de restauration de la messe selon le rite des Gaules célébrée par l’Eglise orthodoxe de France.

« Ainsi l’œuvre de saint Germain n’a pas disparu et ce grand liturge mérovingien est le patron de la renaissance de l’Orthodoxie en France. » José Foatelli, en juillet 1965

« Le Christ naît, et les deux éloignés, Dieu et l’homme, le céleste et le terrestre, s’harmonisent.

Le Pré-Eternel devient petit enfant, le Hors-du-temps s’inscrit dans le temps. L’Absolu épouse le relatif. » Mgr Jean de Saint Denis, 1905-1970, message de Noël

1 – Vous entrez dans l’Eglise

La majesté de Dieu se fait évidente dans la mesure du silence intérieur de celui qui la veut percevoir. Avant d’entrer, vous laisserez dehors le poids de vos scories psychiques : vos griefs contre un autre, vos pensées vulgaires, vos illusions ou vos désillusions. Bref, il faut se défaire de son « moi » – ou de ses « moi ». Ô paradoxe ! C’est en s’enveloppant de cette carapace de « moi » qu’on est nu, c’est en se dévêtant qu’on se revêt comme il convient à la prière autant qu’aux vrais contacts humains.

L’église est orientée. A l’Orient : le sanctuaire, où seul accède le clergé majeur. Il y entre par les « portes saintes » : celles du centre, entre les deux icônes du Sauveur (à droite) et de la Mère de Dieu (à gauche). Le sanctuaire symbolise le ciel, et par conséquent la dimension spirituelle, ou noétique, de notre vie. Il symbolise le Royaume de Dieu, ou monde transfiguré, ou humanité réelle en-avant de l’histoire de ce monde.

Au nord du sanctuaire, l’autel latéral appelé prothèse, où, avant la célébration liturgique, le clergé majeur prépare les Dons (pain et vin mêlé d’eau). A l’autre extrémité, c’est à dire au sud, le diakonikon, où les célébrants se revêtent de leur ornements.

Entre l’entrée de tous (portes royales pour le peuple royal) et les trois portes du sanctuaire, vous noterez la place (variable) :

– de l’ambon, où le lecteur fait les annonces (célébrations, fêtes et sanctoral de la semaine, mariages, baptêmes, etc.)

– de la chaire, où le diacre lit l’Evangile, où le prêtre prononce l’homélie, et près de laquelle se tient, le plus souvent, l’icône de la fête du jour,

– du chœur, où les chantres, au nom du peuple rassemblé, interprètent l’ordinaire et le

propre de la tradition liturgique,

– du baptistère (à l’Occident), ou cuve baptismale,

– de la table d’offrande, tout près de l’entrée occidentale, avec les cierges, l’huile, l’encens, les prosphores (pains pour l’eucharistie), le vin. les diptyques, les publications

spirituelles, et surtout, les saintes icônes.

En entrant pour prier dans l’église, vous prenez votre offrande (un ou plusieurs cierges si vous venez en dehors de la liturgie). L’argent que vous déposez à cette occasion est aussi une offrande. Puis vous vous rendez près des portes saintes (séparation démarquant le sanctuaire), bénissant la Divine Trinité par trois signes de croix, baisant l’icône du Sauveur et celle de la Mère de Dieu. Vous vous recueillez devant les autres icônes et les baisez pareillement, laissant vos cierges allumés devant celles de votre choix.

Le cierge est revêtu d’un éminent symbolisme : lumière nue et naturelle, il représente, par consumation de la cire (matière bénie), le chrétien en prière. Sa flamme est icône de la grâce incréée de Dieu. La mèche qui se consume, notre « moi », vie psychique et corps périssable.

Dans le cierge, le don s’accomplit entièrement en consumant l’objet offert : unissant le visible à l’invisible, ce qui est offert dans la matière est reçu dans l’esprit.

Si vous venez pour la célébration liturgique, vous vous rendez de même, pour commencer, à la table d’offrande. Vous ajoutez aux cierges une prosphore, ou de l’encens, ou de l’huile, ou du vin ou l’ensemble… que vous porterez avec tous aux portes saintes, à l’appel du diacre, au moment du grand offertoire, ainsi que votre diptyque (double feuillet sur lequel, on inscrit, à gauche les noms des vivants, à droite celui des défunts).

Alors le diacre prononcera :

DEBOUT ! SOYONS ATTENTIFS ! EN SILENCE !

Et la divine liturgie commencera.

Entrée du clergé célébrant

des portes royales

aux portes saintes

« Seigneur notre Dieu, qui as établi les armées angéliques pour servir ta majesté dans les cieux, fais que notre entrée au Saint des Saints soit celle aussi de tes incorporels, et qu’ils célèbrent avec nous ta gloire illimitée… »

Le clergé célébrant est dans le sanctuaire :

« Roi du ciel, Consolateur, Esprit de Vérité…

puis le TRISAGION : « Agios ô Theos…

le prêtre prononce la COLLECTE

le lecteur, à l’ambon lit l’épître

le diacre, de la chaire, lit l’ÉVANGILE

le chœur chante

le prælegendum (variable,

appartenant au PROPRE

de la liturgie)

en dialogue avec le chœur

le KYRIE ELEISON, l’HYMNE le GRADUEL précède les lectures

l’ALLELUIA

et le prêtre prononce l’HOMÉLIE :

2 – Debout ! Soyons attentifs ! en silence !

On se tient debout devant Dieu. L’assemblée concélèbre avec les anges, avec le clergé, avec le chœur : elle participe activement, chacun y mettant tout son être, à l’action liturgique. D’où ce premier appel diaconal qui invite tous et chacun à se tenir DEBOUT. (Ce qui n’exclut pas l’évidente charité de l’Eglise, illustrée par quelques sièges peu nombreux mais en quantité suffisante pour les personnes âgées, malades ou très fatiguées. Et, quand c’est possible, la station assise pour le plus grand nombre à la lecture de l’épître et à l’homélie.)

Soyons ATTENTIFS !… Ce qui veut dire : attention ! ne perdez pas d’avance, par le gâchis d’une âme livrée à la foule de ses « moi »…, ne perdez pas d’avance les trésors que la liturgie va déverser dans la coupe de votre cœur spirituel.

Etre attentif, c’est devenir cette coupe réceptive à l’initiation à la vie divine. C’est l’art sacerdotal par excellence. tt encore une fois, attention !… faites en sorte que ces surabondants trésors ne tombent

pas en pure perte sur la caillasse de votre vacarme psychique (pensées folâtres, émotions, etc.), mais dans une terre réceptive, comme une semence de vie dignement reçue.

Soyez cette terre qui attendait, soyez cette coupe ordonnée à l’action de rece­voir et de s’emplir.

EN SILENCE. Non seulement : tout bavardage, en empêchant les autres de se tenir attentifs, serait indécent. Mais encore : cessez de bavarder avec vous-même, lèvres closes. A la fin des temps modernes, il s’avère que l’Occident qui s’est enlisé dans les idéologies issues du rationalisme, discute beaucoup trop. La discussion sert de prétexte au vide de la pensée, à l’absence d’attention véritable, au refus d’écouter quelqu’un d’autre.

Or, tout au long de la liturgie, ce qui est intéressant, c’est ce que, DANS la liturgie, Dieu va dire.

Nous savons qu’il est plus important de croire Dieu que de se faire des discours à propos de la manière dont on croit « en » Dieu. Et beaucoup plus intelligent de converser avec Dieu que de discuter avec soi-même.

Silence donc, et que notre cœur devienne l’Eglise, le temple empli de l’Esprit Saint.

3 – La synaxe des catéchumènes

« Debout » ! s’écrie le diacre, « soyons attentifs, en silence ». A pas lents, précédé des grands cierges allumés que brandissent les acolytes (porte-lumière), le clergé fait son entrée. Il pénètre dans le sanctuaire pendant que le chœur développe le prælegendum : texte variable qui se rapporte à la fête ou au saint du jour, ou à la période liturgique (Avent, temps de Pâques…)

La première SYNAXE des divines liturgies vient de commencer, celle des catéchumènes. ordonnée à l’instruction : prières d’entrée, épître apostolique, évangile, homélie, prière pour toute l’Eglise et pour tout l’univers. Il y en aura une autre, à laquelle ne devraient participer que les baptisés, concélébrants du fait de leur baptême-et-chrismation, et qui sera celle des fidèles, ordonnée au sacrifice eucharistique, avec la communion.

« Agios ô Theos… » Le TRISAGION (« trois » fois Saint) est, dans le rite des Gaules chanté en trois langues, grec, latin, français, avec encensement de l’autel. Il précède la bénédiction de la Trinité divine : « Bénie soit la Sainte Trinité, l’indivisible Unité, éternelle, immortelle, invisible… »

Puis le chant lentement modulé du « Kyrie eleison » (Seigneur-Kyrios, fais-nous la miséricorde de ta grâce) appelle sur l’assemblée la pitié aimante du Très-Haut, aussitôt suivi de l’Hymne qui nous ramène au Propre, c’est à dire l’élément variable, si incommensurablement riche dans le rite d’Occident décrit au VIe siècle par le saint évêque Germain de Paris.

Entourés de chants (graduel, alléluia, « Tu es béni Seigneur… ») l’EPÎTRE apostolique, parfois remplacée par l’Ancien Testament, et l’ÉVANGILE sont chantés tour à tour.

L’HOMÉLIE du prêtre achève l’enseignement donné sous forme de prédication.

Alors, l’assemblée des baptisés se prépare aux divins mystères eucharistiques. Et tous, unanimement conduits par le diacre, prient pour toute l’Eglise, répétant : « Kyrie eleison », « Accorde Seigneur… » Avant que le diacre, portant les Saints Dons de la prothèse au sanctuaire selon le rite de la grande entrée, se rende à la prothèse, le prêtre se présente, face aux fidèles, aux portes saintes et prononce

la Préface au peuple :

« Bien-aimés frères, invoquez avec moi l’Esprit Saint afin qu’Il me communique sa vertu ineffable, et que moi, prêtre indigne, j’ose apporter la sainte Oblation de Notre Seigneur Jésus Christ, car en vérité, c’est Lui qui offre et qui est offert, qui reçoit et qui distribue, coéternel au Père et à l’Esprit Saint dans les siècles des siècles. »

D’une seule voix, les fidèles répondent : « Amen ! L’Esprit Saint descendra sur toi, et la vertu du Très-haut te couvrira. »

4 – Le mystère eucharistique

« Debout ! Soyons en silence ! Mystère de foi »

Cette catéchèse ne décrira pas la liturgie dite des fidèles (ou des initiés). Pourquoi ? Parce que, narratifs ou explicatifs, les mots trahiraient le mystère.

Il faut le vivre. Cela requiert les sacrements de baptême et de chrismation. Splendeur de l’intériorité la plus profonde, ces choses ne deviennent accessibles qu’aux initiés.

Il faut « en être ». Avant de communier, chacun dira : « …car je ne révèlerai pas tes mystères à tes ennemis… »

Quand (rite de la grande entrée) on a conduit en procession les saints Dons de la prothèse à l’autel, le chœur chante : « Que toute chair humaine fasse silence et se tienne dans la crainte et le tremblement, qu’elle éloigne toute pensée terrestre ».

Tout aspirant à la communion orthodoxe doit noter ce qui suit :

Quand le prêtre a dit « ceci est mon Corps…, ceci est mon Sang…, » commence la prière d’épiclèse : « … afin que ce sacrifice devienne véritablement le Corps et le Sang de ton Fils notre Seigneur Jésus Christ par la puissance insaisissable et infinie de ton Saint Esprit.

Amen ! Amen ! Amen !

C’EST PAR L’ACTION DU SAINT ESPRIT que le pain est transformé en CORPS du Christ et que le vin mêlé d’eau est transformé en son SANG précieux.

Présence réelle. Réelle union du divin à l’humain dans la communion. Mystère de foi.

5 – Le cycle liturgique

En Occident, l’année liturgique commence par l’Avent (vers 10/15 novembre). Cette phase de préparation, appelée Avent, fut établie chez nous, dans l’Eglise des Gaules avant le VIe siècle

pendant lequel l’historien sacré Grégoire de Tours en fait mention. Elle est explicitement nommée en 567 au 2ème concile de Tours, puis, en 582, au concile de Mâcon.

L’AVENT – Adventus = avènement. Période de 6 semaines avant le 25 décembre. (En Orient, lui correspond un Carême de 6 semaines).

Elle traduit une progression de l’espérance : d’une part le Christ est venu s’incarner au milieu des temps, d’autre part II reviendra dans toute sa gloire à la fin des temps et le

HUITIÈME JOUR commencera.

« Voici que le nom du Seigneur vient de loin…

« Le Seigneur viendra…, s’Il tarde attendez-LE…

« Dieu paraîtra au grand jour…

« Viens Seigneur, ne tarde pas…

Les SEPT jours qui précèdent la Kénose de Nativité (25 décembre), chantent les noms du Seigneur qui vient. A chaque NOM annoncé par une phrase commençant par Ô, on allume une des sept lampes du sanctuaire :

Ô Sagesse… – préparation des voies.

Ô Adonaï….

Ô Rejeton de Jessé

Ô Clé de David

Ô Orient

Ô Roi des nations

Ô Emmanuel… – Dieu avec nous.

La signifiance de SEPT : six jours de création + le SEPTIÈME, pour la bénédiction de ce qui a été créé.

A la Nativité sera chanté le HUITIÈME Nom : Ô CHRIST.

HUIT = le jour sans fin du Royaume, après la fin de ce monde et le retour du Seigneur en gloire.

LES THÉOPHANIES – (Theos = Dieu, phainein = apparaître)

Théophanie = Dieu INITIE sa créature.

Il y a trois théophanies dites DE NOËL :

KÉNOSE DE LA NATIVITÉ DU CHRIST (dite Noël, 25 décembre) : liturgie célébrée à minuit, naissance prééternelle du Verbe, Fils incréé, engendré du Père avant les siècles ; liturgie du jour, célébrant la naissance dans le temps, l’Incarnation historique du Verbe, Jésus Christ.

ÉPIPHANIE (epiphaneia = apparition, 6 janvier). L’étoile annonciatrice apparaît aux mages, c’est à dire aux détenteurs de la vraie science. Au terme de leur quête spirituelle, ces vrais gnostiques (= connaissants) trouvent la Vérité-Vie que les sages authentiques cherchaient depuis toujours :

ils reconnaissent en Jésus le Fils incréé du Père sans commencement. Alors, l’Enfant-Dieu reçoit les dons : l’encens, l’or, la myrrhe. Il est couronné par l’homme Connaissant. L’ÉPIPHANIE est notre initiation aux fins dernières de l’intelligence humaine : accéder à la pleine lumière dans le cri d’amour à la royauté du Christ.

THÉOPHANIE DU BAPTÊME DU CHRIST DANS LE JOURDAIN et BÉNÉDICTION DES EAUX

(12 janvier, fête parfois célébrée le dimanche le plus proche)

L’humanité reçoit, de la divine Trinité elle-même, la révélation de la vie trinitaire au-dessus des cieux. Et, ce jour, la nature cosmique est sauvée la première, avant l’homme. La THÉOPHANIE nous initie au saisissement des deux extrêmes : la plénitude de l’être, le chaos ténébreux

La phase des Théophanies, dites de Noël, se termine, le 2 février, par LA SAINTE RENCONTRE (ou Chandeleur, fête de la LUMIÈRE). Allusion aux paroles de saint Siméon : « Lumière qui doit se de révéler aux nations… » BÉNÉDICTION DES CIERGES.

LES GÉSIMES – Semaines préparatoires au Carême de Pâques : septuagésime, sexagésime, quinquagésime (avec le retrait de l’Alléluia, qui ne sera plus chanté qu’au Samedi Saint, au retour de l’Alléluia).

L’ALLÉLUIA est, en effet, une exclamation de fête. Et le peuple se met en quête de la grâce du repentir : car « celui qui connaît son péché devient plus puissant que celui qui ressuscite les morts ».

LE GRAND CARÊME DE PÂQUES – Six semaines avant la Semaine Sainte. Il commence par le mercredi des Cendres, jour où tous les fidèles se demandent pardon et se réconcilient.

Le 1er dimanche de Carême voit la célébration du Triomphe de l’Orthodoxie (victoire orthodoxe au IXe siècle, en Orient, sur les iconoclastes).

Le deuxième, fête de saint Grégoire Palamas, axé sur la Transfiguration, prépare les catéchumènes à la Passion volontaire du Christ et guide les pénitents vers la contemplation de la Lumière divine.

Au début de la sixième semaine, le dimanche de la Passion : « les étendards du Roi s’avancent, la Croix dans son mystère brille… »

Enfin, au dimanche des Rameaux, le Seigneur entre dans la ville sainte.

SEMAINE DE LA PASSION – (ou SEMAINE SAINTE)

« Nous mourons en Christ pour ressusciter avec LUI »

Le GRAND JEUDI – Fête de l’institution de l’Eucharistie. Lavement des pieds.

« Je vous donne un commandement nouveau, de vous aimer les uns les autres. »

Le GRAND VENDREDI – L’autel ayant été dépouillé la veille, on célèbre la Mort du Christ en Croix, à 15 h. Vénération de la Croix : « Voici le bois de la Croix sur lequel le Salut du monde est suspendu. Venez, adorons-le… »

Le GRAND SAMEDI – Bénédiction du Feu Nouveau et du cierge pascal. On baptise les catéchumènes. La grande joie commence au chant de l’EXULTET.

LE TEMPS PASCAL – LE JOUR DE PAQUES EST LE PLUS GLORIEUX DE TOUS.

L’année liturgique culmine à Pâques, fête de la Résurrection. Fête des fêtes.

A la dernière semaine pascale, les lundi, mardi et mercredi sont jours de rogations (rogare = demander) : prières introduites en Gaule après 400, par saint Mamert, pour conjurer les fléaux.

Le temps pascal s’achève par :

L’ASCENSION : dorénavant, c’est INVISIBLEMENT que le Christ ressuscité demeurera parmi nous. On éteint le cierge pascal.

LE TEMPS DE PENTECÔTE – Fête du Saint Esprit qui descend sur chaque apôtre et fête de la divine Trinité.

Les DIMANCHES APRES PENTECÔTE nous initieront au mystère de l’Eglise théandrique (divino-humaine) et, par une vision de la fin du monde, nous prépareront l’AVENT, c’est à dire à une nouvelle année liturgique.

Jusqu’au dernier dimanche :

LA TRANSFIGURATION SUR LE MONT-THABOR, rite composé au XIIe siècle par Pierre le Vénérable, abbé de Cluny et comportant la BÉNÉDICTION DES FRUITS.

LA DORMITION DE LA MÈRE DE DIEU, avec le rite, venu de Jérusalem, de l’ensevelissement de la Vierge.

LA TOUSSAINT, 1er novembre : les SAINTS sont les fruits de l’action du Saint Esprit et les témoins de sa Présence constante dans l’histoire de l’Eglise.

LE JOUR DES DÉFUNTS, 2 novembre. Les défunts, « depuis Adam jusqu’à nos jours ».

Et, de nouveau, l’AVENT va commencer…

EPILOGUE

« Je le répète, l’important dans la nourriture étant le dosage des aliments et la régularité de l’absorption, la prière-nourriture exigera de l’être un canon de règles prescrites d’avance en tant que faire se peut. Sagement réglée, modelée sur notre vie, elle nourrira notre âme et fera notre esprit vigoureux. Le désordre est particulièrement négatif. Malheureusement, de même que nos occupations dérèglent souvent nos repas (et ceci est mauvais), nous ne vivons pas dans un monastère, qui est une « usine » où la prière est réglée, ajustée, harmonieuse.

« Il y eut une période où chacun me demandait de lui communiquer un « mantra « c’est à dire, en termes hindous, une formule personnelle de prière perpétuelle. Perpétuelle ! pour la plupart, c’était impossible. Je répondais alors : priez seulement quinze minutes par jour. Et lorsqu’un mois après la même personne revenait, elle avouait inévitablement n’avoir prié quinze minutes que deux ou trois jours dans le mois. Cependant, coûte que coûte, il faut établir une certaine régularité. La prière nourrira notre esprit en proportion de sa régularité.

« Le défunt swami Siddhesswarânanda enseignait que, pour avancer spirituellement, il est nécessaire de consacrer six heures par jour à la méditation et à la prière pendant cinq ans.

Alors, la première étape est franchie. Il avait raison. Mais qui le fait ? Nous sommes tellement agités qu’un quart d’heure par jour nous parait déjà très long, ce qui ne nous empêche pas de perdre des heures à des occupations inutiles. Ce n’est pas la faute de l’extérieur, c’est celle de notre instabilité intérieure.

Quel est le régime classique du partage spirituel de la journée, partage dont le but est l’équilibre physique, psychique et spirituel ? Les Pères ont répondu : 8 heures de travail, 8 heures de repos comprenant le sommeil, la nourriture, la conversation, la détente, et 8 heures de prière.

Ceci est logique et semble aisé. C’est l’idéal.

Nous sommes tous au-dessous de cet idéal. Immanquablement, l’esprit est diminué, sous- alimenté. Nous faisons tous de la tuberculose spirituelle. »

Mgr Jean de Saint Denis, 1905-1970, 1959 (cours à l’Institut)

Dieu a tout créé par son Verbe. Dieu est Trinité. Le Verbe s’Incarne.

Nous le confessons : notre Seigneur Jésus Christ, DIEU parfait, HOMME parfait. UNE seule personne divine consubstantielle au Père et au Saint Esprit qui procède du Père…, UNE seule personne, disons-nous avec force, et DEUX natures, DEUX énergies et volontés.

Christ ressuscite le troisième jour après sa mort en croix. « Par sa mort Il a vaincu la mort, à ceux qui étaient dans les tombeaux Il a donné la Vie ».

Dieu crée les mondes par surabondance de son amour. Pour dire « toi » à quelqu’un d’autre. Le but de la création est la déification de la créature. Dieu déifie par les énergies incréées de sa grâce. Sa grâce est lumière. Déifiée par la grâce, la libre créature devient lumière.

Grâce et liberté ne s’opposent pas. Le salut consiste en la libre acceptation et quête de la grâce, en la transformation volontaire de toute la vie par les énergies incréées de Dieu ami de l’homme.

Transformation librement voulue, nous insistons…, demandée de toutes nos force par libre prière. Agie par l’homme, agie par Dieu. Deux mouvements donc. Synergie.

Deux mouvements ? Voilà l’Eglise. « Le Saint Esprit et nous, unanimement, confessons… « . Avons-nous dit cela ? Voilà les conciles, voilà les dogmes.

Le Saint Esprit et nous : POUR qu’il y ait harmonie, dans nos comportements, entre ce que Dieu veut et ce que l’homme fait. Voilà les saints canons.

Loi de synergie signifie : loi d’harmonie. Qui dit harmonie, dit : accord. Accord entre le divin et l’humain : il y a DEUX natures en Christ, et DEUX volontés. Accord entre les baptisés qui ont « revêtu

le Christ » : UN comme sont UN le Père et le Fils et le Saint Esprit. Il y a enfin des personnes, en vérité.

Alors, voilà la communion.

Car qui dit communion, dit : personne, hypostasis. L’Eglise prend des individus (c’était le péché), elle en fait des personnes (c’est le Royaume). Pourquoi parce que l’Eglise communique la divine Trinité à la terre. Voilà la joie de vivre.

Mangez mon CORPS, buvez mon SANG. Le Christ se donne en nourriture aux pécheurs pain supersubstantiel et déifiant, source immortelle et déifiante. Et le Saint Esprit transforme LUI-MÊME le pain en Corps et en Sang le vin mêlé d’eau. Toute l’Eglise est épiclèse. Voilà les sacrements.

Créatures, nous ne « sommes » que potentiellement. Pécheurs, nous étions enlisés dans la corruptibilité

Mais nous ressusciterons avec le Christ, alléluia ! Nos corps seront des corps de gloire. Incorruptibles. Alléluia ! Alléluia ! Alléluia !

Tristesse, tu meurs avec la mort. Tristesse, tais-toi. Doute, tu te décomposes avec la mort.

Doute, tais-toi.

Et toi, membre vivant du Corps vivant du Christ vivant…, et toi, de quoi douterais-tu ? Ne doutant plus, de quoi serais-tu triste ? Humain-pas-assez-humain, tais-toi. Seul est humain parfait le Christ.

Que reste-t-il à faire ?

Dieu a parlé. Dieu parle. Dieu te parle. Il ne te reste qu’à entendre parler Dieu qui te parle. Crois Dieu.

Alors, oui ? Tu as compris ? Tu parles à Dieu. Il t’entend. Il te croit. Dieu n’est pas sceptique.

Dieu croit l’homme, même quand l’homme ne croit pas Dieu : noblesse oblige, Dieu sait l’homme.

Dieu prie l’homme, même quand l’homme ne prie pas Dieu. Dieu aime l’homme. (Entre nous, que crois-tu que ça LUI rapporte ?)

Quand tu parles à Dieu, avec ces mots que la liturgie met dans ta bouche, avec ce mouvement que la liturgie imprime à ton sang…, quand tu parles à Dieu de toute l’unité divinement retrouvée de ta triade corps-âme-esprit…, tu pries. Quand tu pries, tu vis. Oui ou non, veux-tu vivre ?

Pour vivre, va à la vie. Va à Dieu. Où est la vie ? Dieu te le dit. Dans l’Eglise où est Dieu agissant, Dieu donné, Dieu déifiant.

L’existence est une polyphonie d’énergies en jeu. Tout vibre, tout signifie. L’univers est énergétique.

Tu n’es pas un pétale sec collé ou piqué sur un herbier. L’univers n’est pas un herbier ; l’univers c’est du vent dans l’herbe et de l’herbe qui bouge au vent.

Inconnaissable sans la nature intime de sa. suressence, Dieu SE manifeste par ses énergies incréées. Tout ce qui vibre dans l’énergétique créé signifie Dieu incréé agissant donné déifiant.

Or, Dieu l’a voulu dans son sur-actif amour, le ciel est sur la terre. Voilà les icônes.

Ce monde passe, la grâce vient. Ce monde passe, pour que la grâce vienne. Et la grâce vient.

Ce monde passe, la grâce ne passera pas. Elle ne passera pas.

Le Christ était. Il est. Il vient. Maranatha ! Viens, Seigneur Jésus, viens et ne tarde pas !

Il n’y a rien d’autre à dire. Tout le reste est prière, amour, doxologie. ORTHODOXIE. Voilà la vie !

* * *

[1]. Le mot grec GNOSIS = connaissance. D’où, GNOSTIQUE = celui qui sait, ou encore celui qui n’a plus besoin de

la foi pour savoir, puisqu’il connaît supérieurement. La vraie gnose existe, mais l’on comprendra sans peine que

des voies de facilité aient été suivies : il existe des « gnoses » de pure fantaisie.

[2]. Qu’est-ce qu’un concile œcuménique ? Pour le comprendre, il faut se rappeler que, d’une part la TRADITION VIVANTE est passée des Apôtres, témoins directs, à la totalité du peuple chrétien, ou peuple royal, et que, d’autre

part, le SAINT ESPRIT, toujours agissant, préserve son Eglise de l’erreur qui porterait atteinte à la plénitude de

vie de ses membres.

Quand donc les évêques et les théologiens de toutes les Eglises de Dieu se rassemblent pour poser ces balises de la

foi que sont les dogmes, il y a unanimité entre le Saint Esprit, qui est Dieu, et eux, qui sont des hommes

représentant tout le peuple (« Le Saint Esprit et nous, unanimement, confessons.. », c’est par ces mots que commence

un DOGME.