LE CULTE DE LA MERE DE DIEU
DANS L’EGLISE ORTHODOXE
Présence Orthodoxe n° 137
2-2004
Le trait le plus caractéristique et distinctif de la piété ecclésiastique en regard de toute autre piété est sans contredit le culte de la Mère de Dieu.
Aussi riche et variés que soient les offices orthodoxes, on n’en pourrait ôter un seul, même de caractère privé, où l’on ne s’adresse à la Mère de Dieu pour la glorifier ou la remercier de son aide et de son intercession.
Le culte de la Mère de Dieu a, sans aucun doute, sa base dans la plus ancienne tradition de l’Église universelle. Il suffit de rappeler que ce culte s’est conservé au sein de communautés séparées de l’Église à l’époque des conciles œcuméniques, alors même qu’elles n’avaient semble-t-il nul intérêt particulier à sa survivance ; il en est ainsi des Nestoriens et des Monophysites. Bien entendu nous ne trouvons là que des germes ou plutôt des vestiges du culte universel de la Mère de Dieu qui n’a pu s’y développer ultérieurement en vertu même de la logique spécifique à ces hérésies. Ce qui plaide avec une évidence d’autant plus grande en faveur de l’ancienneté c’est que, fidèle à sa tradition primitive, l’Église orthodoxe semble ne pas trouver d’expression assez digne pour louer la Mère de Dieu et ne connaît pas de limites à sa glorification.
Pour notre Église la Mère de Dieu est supérieure à toute créature terrestre ou céleste – « plus vénérable que les Chérubins et incomparablement plus glorieuse que les Séraphins ». C’est pourquoi l’intercession de la Vierge Marie est, par sa signification et sa puissance, d’une nature différente de toute autre intercession.
Nous chantons : « Ne me confie pas à l’intercession humaine (car telle est celle des saints , ne me rejette pas, mais protège-moi toi-même et aie pitié de moi » Dans l’office de l’Assomption de la Mère de Dieu où sa glorification atteint son apogée, il est dit : « Ta gloire est déiforme », c’est-à-dire qui convient à Dieu et n’est propre qu’à Lui seul.
Le fondement donné par notre Église à cette exaltation illimitée de la Mère de Dieu n’est point seulement le fait, pour ainsi dire extérieur, de la contribution objective de la Mère de Dieu au salut de la race humaine par le fait qu’elle a enfanté selon la chair le Fils de Dieu. A cette contribution, extraordinaire par sa grandeur, correspond aussi la dignité intérieure de la Vierge, sa perfection morale, qui atteint au plus haut degré de sainteté auquel peut parvenir une créaturehumaine avec l’aide de la grâce divine. Tel est le sens intérieur et l’intention de la doctrine de l’Église sur la virginité perpétuelle de la Mère de Dieu.
La virginité lors de naissance de l’Enfant-Dieu est un don divin. La Vierge Marie a transformé ce don, tout au long de sa vie, en ascèse personnelle et, la grâce de Dieu aidant, parvenue à la plus haute perfection, a pris rang dans l’assemblée lumineuse des élus de Dieu dont parle le quatorzième chapitre de l’Apocalypse.
Le voyant aperçoit cent quarante-quatre mille élus qui entourent l’Agneau et le suivent partout où il va. Ce sont les premiers-nés de Dieu et de l’Agneau. Ils sont « sans tache devant le trône de Dieu. Ce sont ceux qui ne se sont point profanés avec des femmes, car ils sont vierges ».
Bien entendu il n’est pas question ici de la pure et simple virginité corporelle. Le démon qui n’est pas exposé à la faute charnelle n’en est pas saint pour autant. Il s’agit là d’une intégrité particulière de l’âme qui s’est attachée à Dieu de manière parfaite, de telle façon qu’elle ne permet à nul désir, à nul attachement de s’interposer entre l’âme et le Seigneur aimé d’elle. Une telle âme vit entièrement et toujours avec le Seigneur et pour Lui.
Il est naturel qu’elle devienne digne et apte à recevoir de Dieu une particulière révélation, inaccessible à d’autres. – « Nul ne pouvait chanter ce cantique que ces cent quarante-quatre mille élus ». Il y a aussi un autre résultat à cette disposition de l’âme : «Si vous demeurez en Moi et que mes paroles demeurent en vous, vous demanderez tout ce que vous voudrez et cela vous sera accordé » (Jn 15, 7) Donc la doctrine de la virginité perpétuelle de la Mère de Dieu, non seulement nous dévoile le chemin par lequel elle est parvenue au sommet de la sainteté parfaite, mais donne aussi une base à notre foi en la particulière puissance de ses prières. Cela serait penser trop humainement que de croire que cette puissance résulte de la parenté selon la chair. Ce motif n’est pas un fondement suffisant parfois même pour les hommes. Il est hors de doute qu’il faut placer au premier rang, pour ainsi dire, la parenté spirituelle : le don entier et sans partage de la Mère de Dieu à son Fils céleste comme au Dieu et au Maître du Divin Royaume, la totale concordance de sa destinée aux destinées de ce Royaume. Demeurant dans son Fils et gardant en elle ses paroles éternelles, la Mère de Dieu a la hardiesse de prier son Fils et elle obtient selon sa demande. La doctrine de la virginité perpétuelle de la Mère de Dieu n’est pas reçue de tous. Beaucoup s’y opposent, même parmi ceux qui, hors de l’Église, croient comme nous à la naissance virginale du Fils de Dieu. Ceux-là ont généralement en vue le fait que les Évangiles font mention des frères et sœurs du Seigneur Jésus. Ils interprètent cela comme s’il s’agissait non point des frères et sœurs par alliance du Seigneur – enfants de Joseph et d’une première femme – mais de véritables enfants de la Mère de Dieu. Dans cette perspective, bien que devenue Mère du Fils de Dieu incarné, la Vierge Marie aurait mené après cela la vie familiale habituelle et aurait même donné naissance à des enfants de Joseph.
Dans cette idée tout à fait inadmissible et même impie pour une conscience orthodoxe, ces objecteurs ne voient nulle absurdité. Bien au contraire, ce fait de mettre la Mère de Dieu au rang commun des hommes souligne selon eux la nature exceptionnelle et unique du Dieu-Homme en ce qu’il est et demeure le seul artisan de notre salut. En outre ils voient là une conformation supplémentaire au fait que l’institution du mariage est divine et bénie, à l’encontre de l’emprise exercée par le monachisme.
J’ai même entendu dire par un ecclésiastique représentant de la science théologique orthodoxe que la décision concernant la virginité perpétuelle de la Vierge était, sinon négative, du moins sujette à caution. Selon lui, seule était importante et requise la confession de la naissance virginale du Seigneur ; est-elle demeurée vierge ou bien mena-t-elle une vie de femme mariée et de mère de famille, la question n’eut été guère importante. Notre foi ne serait en rien altérée par la négation de la perpétuelle virginité.
Ces raisonnements me rappellent ce qui m’a été rapporté des Finlandais qui, dit-on, en certains endroits, se refusent à considérer le Vendredi Saint comme un jour de jeûne et de larme et en font une fête joyeuse qu’ils passent en danses et en divertissements. « La mort du Christ nous a libérés de la malédiction de la mort, disent-ils, pourquoi donc pleurer ? » On ne peut dénier à ce raisonnement une certaine logique. Mais il convient de ne pas oublier que dans le Royaume de Dieu la loi spirituelle est aussi immuable et évidente que les impératifs logiques dans notre pensée. C’est pourquoi l’indigence spirituelle de certaines pensées humaines sur le Royaume de Dieu est le signe évident de leur fausseté.
Ce critère permet de juger de la véracité du témoignage de notre conscience quand celle-ci nous prévient contre de telles arguments. En conservant la fidélité extérieure et logique au dogme, ils cachent une radicale déformation du christianisme, un égoïsme grossier qui ne s’attache qu’à la perspective du profit et négligent le prix auquel ce profit leur fut acquis.
Il en est de même en ce qui concerne ces arguments sur l’inutilité du dogme de la virginité perpétuelle de la Mère de Dieu par rapport à notre foi.
En premier lieu, il est d’une telle évidence à la conscience de l’Église que le mariage est d’institution divine qu’il n’est point besoin de chercher une confirmation supplémentaire dans l’exemple de la Mère de Dieu.
Par ailleurs, le mariage bien que d’institution divine n’en demeure pas moins temporel par son caractère restreint, dans son contenu aux limites de la vie terrestre. « Dans la vie du siècle à venir » – selon les paroles du Sauveur – « on ne prendra ni femme, ni mari, mais ils seront semblables aux anges de Dieu dans les cieux. »
Comme accomplissement de toute chose, cette vie du siècle à venir – autrement dit le Royaume de Dieu – doit être le but dernier et suprême auquel l’homme aspire et auquel sont subordonnées toutes les entreprises terrestres. C’est pourquoi il est parfois nécessaire, dans certains cas particuliers, que le service duRoyaume de Dieu exige de l’homme le sacrifice de sa vie conjugale. L’Apôtre Paul enseigne avec beaucoup d’insistance que le mariage est permis à tous. parfois même il le considère comme plus utile et salutaire que le célibat, par exemple pour les jeune veuves (1 Tim 5, 14). Mais pour lui-même et justement à cause de son apostolat et « pour n’apporter aucune entrave à l’Évangile (1 Co 9, 12), il a choisi le célibat. C’est à cause également de ce même service du Royaume de Dieu que le précurseur Jean n’était pas marié. Combien donc est-il plus naturel encore que la Vierge Marie ait fait cette même offrande, elle qui était appelée à un rôle si parfaitement exceptionnel par sa grandeur et sa grâce !
Après que la Vierge Marie eût déjà accepté ce service et soit devenue la Mère du Fils de Dieu selon la chair, la vie conjugale eût été pour elle, non seulement psychologiquement impossible, mais moralement interdite. Quelle aurait donc été la chute de la Mère de Dieu, si après ce qui s’était accompli en elle, elle avait mené la vie habituelle d’une femme mariée ! Non seulement elle avait été choisie pour devenir la Mère du Seigneur, mais elle avait consenti de sa propre volonté à ce service : « Voilà la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole » (Lc 1, 38).
En ce qui concerne les frères et sœurs de Jésus, dont il est fait mention dans les Évangiles – au sujet desquels, d’ailleurs, il n’est jamais parlé comme des enfants de la Vierge Marie – l’Évangéliste Jean nous en donne dans son récit l’explication. Ce dernier rapporte que le Seigneur pendu à la Croix lui confia sa Mère à lui, comme il le confia à elle.
Le Seigneur n’aurait eu nulle raison de porter à un tel moment son attention sur sa Mère, s’il n’était son Fils unique, et si son âme à elle n’eût été tout entière occupée par le lien qui l’unissait à Lui. Avec la mort d’un tel Fils la Mère de Dieu perdait, non seulement ce Fils, mais le sens même de sa vie. Voilà pourquoi elle fut confiée à Jean qui, comme elle, était vierge (peut-être est-il le seul auquel l’Église donne ce nom), c’est-à-dire s’était donné à Dieu sans partage. Si Marie avait eu d’autres enfants ses relations avec son Fils premier-né eussent été autres ; sa mort ne l’eût pas laissée seule et sans asile, ses enfants eussent été ses protecteurs naturels. Il eût même été inconvenant que Jean séparât la Mère de ses enfants et la « prît chez lui ». Seule, la toujours Vierge « plus pure que les Anges », comme le chante l’Église, avait besoin de la sollicitude de son divin Premier-né et pouvait être l’objet de cette sollicitude, même à cette heure où « tout était consommé » (Jn 19, 18).
Les catholiques romains partagent avec nous la foi pieuse en la vertu des prières de la Mère de Dieu et entourent la Vierge Marie de la plus haute vénération. Cependant ils considèrent que la glorification unique que l’Église orthodoxe lui rend n’a pas de fondement suffisant dans notre doctrine.
Comment peut-on nommer la Mère de Dieu « très sainte, très pure, immaculée », comment peut-on la considérer « plus pure que les Anges », lui attribuer la gloire « propre à Dieu » et supposer en même temps que la Vierge Marie partage avec nous pécheurs, par sa naissance, toutes les conséquences du fait d’être de la descendance d’Adam.
Les catholiques romains pensent pouvoir combler cette « lacune » par la doctrine de « l’immaculée conception » : en prévision de son rôle tout à fait exceptionnel, la Vierge Marie est placée hors de la postérité habituelle d’Adam – elle apparaît comme une nouvelle créature de Dieu, créée tout exprès pour devenir la Mère de Dieu qui devait s’incarner
C’est là selon cette doctrine, la raison pour laquelle la Vierge Marie surpasse toute créature par sa sainteté, sa pureté et sa gloire.
Nous n’avons pas l’intention d’analyser ici cette doctrine de l’Église catholique-romaine. Bornons-nous à remarquer que par ses déductions finales cette doctrine porte atteinte au dogme fondamental de l’économie de notre salut par la vraie incarnation du Fils de Dieu. Elle lui porte atteinte d’abord en risquant de rompre l’unité de notre nature et de celle du Dieu devenu homme, alors que sur cette unité se fonde toute l’économie. Ensuite parce qu’ainsi une exception à la loi commune eût été faite en faveur de la Vierge Marie : elle aurait été exemptée du péché par le caractère même de sa nature, et non par don divin, tandis que celui-ci suppose la participation de la libre volonté comme ascèse morale personnelle. Si une telle exception est chose possible, on peut se demander pourquoi toute la descendance d’Adam n’eût pu bénéficier de la même exception. Et dans ce cas l’incarnation du Verbe divin était-elle absolument indispensable à notre salut ?
Outre le danger dogmatique qu’elle constitue, cette doctrine ne renforce ni ne justifie la glorification que l’Église rend à la Vierge, elle la réduit bien plutôt et en restreint le caractère illimité.
La perfection innée possédée en dehors de la volonté n’a aucune valeur morale, de même que toute vertu naturelle de la même espèce : ce qui prime, c’est la perfection et la pureté d’une créature. Plus elle est haute, plus elle nous étonne, plus est grand le danger de dépasser la mesure et d’adorer la créature en lieu et place du Créateur.
Par exemple, d’après Arius même, la gloire du Fils de Dieu surpassait celle de tout être créé ; cependant, considérant le Fils de Dieu comme créé, il n’aurait pu qualifier sa gloire de « propre à Dieu », même dans un sens conventionnel, sans dépasser la limite autorisée ou tout au moins sans permettre à d’autres de la dépasser.
Sans aucun doute, l’Église aurait eu les mêmes craintes en glorifiant la Mère de Dieu si par sa perfection innée elle s’élevait au-dessus du genre humain.
Le polythéisme incriminé par les protestants et les libres penseurs aux catholiques romains, polythéisme où l’on pourrait percevoir une survivance du culte païen de la déesse-mère n’est peut-être pas aussi injustifié que le souhaiterait l’Église romaine.
L’Église orthodoxe n’admet pas l’enseignement catholique romain sur l’immaculée conception de la Vierge Marie. Si elle la nomme « immaculée » c’est dans un sens relatif et non spécifique, comme on peut qualifier toute naissance de parents pieux, naissance due à la grâce de Dieu et à la prière et non à la souveraineté de la chair.
Notre Église, fidèle à la parole de Dieu et à la Tradition de l’Église universelle, cherche le fondement d’une telle glorification de la Mère de Dieu, non dans sa conception, mais au contraire dans sa dormition, dans l’achèvement de sa vie. C’est à ce moment que tous les ascètes chrétiens « ayant achevé leur course et gardé leur foi » attendent « la couronne de justice du juste Juge » (Tim 4, 7-8). Par ses paroles « Voici la servante du Seigneur », qui exprimaient sa libre volition, son acceptation de se charger du service de Dieu en devenant la virginale Mère du Fils de Dieu, la Vierge Marie était restée jusqu’à son dernier souffle fidèle à cette destination et par l’ascèse de la perpétuelle virginité (dont nous avons expliqué plus haut le sens spirituel) a atteint avec la grâce de Dieu le sommet de la perfection accessible à l’homme et en général à tout être créé.
Cette sainteté atteinte avec participation de la volonté a rendu la Vierge Marie digne et apte à recevoir « la couronne de justice » tout à fait exceptionnelle, dont l’honora le Juge – son Fils – et qui même après sa mort lui permet de « sauver toujours son héritage » en qualité de Mère de Dieu. Nous parlons ici de l’Assomption, de l’élévation au ciel de la Mère de Dieu avec son corps après sa mort, événement qui sert de thème à l’office orthodoxe de la Dormition et surtout au rite de l’ « enterrement » de la Mère de Dieu. Le mot « Assomption » signifie concrètement qu’après sa mort physique la Mère de Dieu est entrée dans la vie du siècle à venir, non seulement avec son âme immortelle, mais avec son corps devenu semblable à celui de Notre Seigneur Jésus-Christ ressuscité et qui a déjà subi la passage de la corruptibilité à l’incorruptibilité, passage qui attend le reste de l’humanité après la Résurrection générale.
L’Apôtre dit : « Le corps est semé corruptible, il ressuscite incorruptible, il est semé méprisable, il ressuscite glorieux, il est semé infirme, il ressuscite plein de force, il est semé animal, il ressuscite corps spirituel » (1 Co 15, 42-44). C’est en ceci que consiste le renouvellement de la nature humaine déchue, comme le but et le fruit de la venue dans le monde du Fils de Dieu, de sa Passion, de sa Mort et de sa Résurrection.
L’Église voit en la Mère de Dieu l’initiatrice de ce renouveau spirituel (Acathiste), c’est-à-dire les prémices où est accompli le commencement de la reconstruction spirituelle de l’humanité, l’exemple, pour ainsi dire ou l’inauguration de cette reconstruction. En d’autres termes les espoirs les plus ardents de la Chrétienté ont été réalisés en premier lieu par la Mère de Dieu. Son exemple est le gage de notre renouveau et de notre résurrection.
Voilà où réside le gloire de la Mère de Dieu et pourquoi les âmes croyantes éprouvent une telle joie à contempler et à célébrer cette gloire, qui surpasse à n’en pas douter, et de beaucoup celle par laquelle l’Église catholique-romaine entend honorer la Mère de Dieu dans la doctrine de « l’immaculée conception »
Il convient de ne pas oublier que le renouvellement de la nature humaine est étroitement lié à sa déification. Il est dit que le renouvellement de la nature humaine est étroitement lié à sa déification. Il est dit de Notre Seigneur Jésus-Christ qu’ « Il a déifié le corps humain » (prière avant la communion), c’est-à-dire qu’en s’incarnant, il déifia la nature humaine du Dieu fait homme et tous ceux qui demeurent dans le Christ participent à la déification du corps et de l’âme. C’est ainsi que dans le canon des matines du Jeudi-Saint, le Seigneur dit à ses disciples : « Dans mon Royaume, je vous l’affirme, je boirai avec mes amis un breuvage nouveau et ineffable, et étant Dieu, je vivrai avec vous comme avec des dieux… » (3e Nocturne, 7e strophe, dans le rite actuel de l’Église Orthodoxe de France, dont la restauration a été patronnée par le Patriarche Serge de Moscou. N.D.L.R.) Il y a donc nulle exagération à définir la gloire de la Mère de Dieu : « Ta gloire est celle qui convient à Dieu », comme il est dit dans l’office de l’Assomption.
D’aucuns considèrent que la glorification de la nature humaine de la Mère de Dieu après l’Assomption n’est pas essentielle à notre foi comme l’est notre doctrine de la virginité perpétuelle. Il me souvient que les promoteurs du rapprochement avec les vieux-catholiques qualifiaient cet enseignement de « tradition postérieure » sans rapport avec celui de l’Église indivise. Pour cette raison il ne serait pas obligatoire pour les vieux-catholiques. Admettons que la révélation de ce mystère appartienne dans ses détails à une époque postérieure, mais le thème en lui même est si intimement lié avec le culte tout à fait exceptionnel et sans contredit universel de la Mère de Dieu, et est à tel point nécessaire à la compréhension de ce culte, que cette doctrine de l’Assomption de la Mère de Dieu a d’indubitables racines universelles.