5ème de l’Avent

5ème DIMANCHE DE L’AVENT

la voix dans le dÉsert

Mgr Jean, évêque de Saint Denis

Au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

L’Église nous préparera, dès demain, par ce que nous appelons les Grandes Antiennes, le « Ô » ; Ô Sagesse, Ô Adonaï, Ô Racine de Jessé…, finissant par le dernier nom : Ô Emmanuel ! Ces sept noms qui nous découvrent l’abnégation de Dieu, de sa venue, sont les noms de sa divinité et de son humanité ou, plutôt, les noms de Dieu qui descend, condescend, S’approche, vient, devient comme nous, est avec nous afin de nous amener vers Lui et vers son Père.

Par les Noms divins, Il a voulu nous révéler une connaissance progressive. Chacun d’eux, mes amis, n’est pas seulement un son mais ainsi que dans le sacrement de l’Eucharistie, il est une coupe, un véhicule où réside la Divinité. Lorsque nous prononçons un Nom divin, nous n’exprimons pas qu’une idée, un sens, une appropriation ou une analogie lointaine : ce Nom que Dieu nous a donné sur Lui-même, ilnous l’a légué comme une puissance. Voici pourquoi à l’annonce du huitième Nom, JÉSUS, l’Écriture dira :Le ciel, la terre et l’enfer s’inclinent et tremblent devant le Nom de Jésus !

C’est en chantant ces Noms, intercalés dans le Magnificat – l’Hymne de la Vierge -, en les chantant consciemment au cours de ces sept jours de préparation, que nous devons chercher la force, la puissance et le soutien pour atteindre dignement les fêtes de Noël, de la Nativité du Christ et jouir, en vérité, de cette grâce insigne de l’Incarnation du Seigneur.

Mais si l’Église nous prépare par les sept Noms – le huitième sera proclamé aux Vigiles de Noël elle nous appelle aussi à jeûner, à nous abstenir cette semaine, autant que possible, de la viande ou de ce qu’il nous sera loisible de faire.

Elle nous guide vers Noël par la confession, la révision intérieure, la purification de notre âme c’est le motif pour lequel Dimanche prochain, comme quatre fois par an, nous aurons la confession générale Venez afin d’être purifiés, car le cœur pur voit Dieu, venez pour demander pardon, recevoir l’absolution de vos péchés et que votre cœur soit pur, et que dans cette intégrité, cette pureté, dans ce cœur lavé, dans cette âme lavée, dans ce corps lavé par la pénitence vous receviez réellement la lumière divine qui resplendit à Noël.

L’Église annonce aussi Noël par les Quatre Temps de l’hiver : mercredi, nous chanterons la Vierge recevant la visite de Gabriel ; vendredi, la même Vierge se préparant à donner naissance au Christ et acclamée par Élisabeth, et samedi nous célébrerons, le soir, une liturgie solennelle avec quantité de lectures, liturgie antique où imitant le chant du coq qui chante le soleil avant son lever, nous chanterons pour appeler le soleil physique en même temps que le Soleil spirituel, le Soleil de justice, l’Orient, le Christ. Cette liturgie est aussi un cri, une supplication à la Lumière ineffable : Viens, ne tarde pas et éclaire ! et nous prophétiserons avec le psalmiste notre Seigneur Jésus-Christ, disant : Tu es semblable à un héros Qui vient de l’orient sur son char de feu et de flamme pour monter au zénith du ciel et illuminer l’occident.

Mais quelle est la préparation de Noël propre à ce troisième dimanche de l’Avent selon le rite romain, le cinquième selon le rite des Gaules ?

L’Église a choisi, aujourd’hui, l’Épître « Réjouissez-vous et encore, je le répète, réjouissez-vous car Son Avènement est proche ». De quelle joie parle l’apôtre Paul ?

La joie, en général, signifie pour nous distraction, sensation agréable venant d’un bon repas, d’une belle musique, d’une plaisante conversation ou même, dans le sens élevé, la joie peut être provoquée par la sensation spirituelle que Dieu nous permet de ressentir au moment des fêtes ou pendant la prière. Est-ce de cette joie dont veut parler l’Apôtre ? Pas précisément.

« Réjouissez-vous ! ». Lorsqu’il dit : « Réjouissez-vous ! »; il donne un commandement, il fait un appel. « Réjouissez-vous dans l’attente du Seigneur », c’est-à-dire, réjouissez-vous dans les épreuves, réjouissez-vous dans n’importe quelle circonstance et il ajoute : « que votre douceur soit connue du monde ». Pourquoi douceur ? Quel rapport y a-t-il entre cette douceur et la joie, cette joie que nous devons souvent gagnez, conquérir, saisir, prendre en main comme une épée devant le monde ? Réjouissez-vous ! Quel est le lien entre la douceur et la joie ?

Nous trouvons la réponse dans les Béatitudes. Notre Seigneur nous enseigne : Bienheureux les doux, ils hériteront la terre. Être doux : est-ce ne point élever la voix, supporter sans murmure les opprobres, adopter un langage un peu sucré, parler de choses douces et agréables sans jamais se mettre en colère ? Non. Tout ceci ne décrit pas cette douceur que le Christ a en vue et que l’Apôtre reprend dans son Épître.

La douceur consiste à être joyeux dans les pires épreuves. Saint Paul vise une joie qui existe dans les peines – dans la joie aussi – mais qui n’est pas liée aux circonstances extérieures, qui n’est pas attachée à un don divin car Dieu nous accorde la joie de l’esprit pendant la prière, qui n’est pas celle que nous pouvons éprouver dans des amitiés, des rapports avec nos semblables… ; il vise la joie non conditionnée par l’extérieur, qu’il nous faut conquérir en dehors de ces conditions extérieures, c’est-à-dire : répondre à nos frères ou à n’importe quel événement par la joie.

Comment le pourrai-je si mon cœur est las, si mon âme est triste. Où trouver cette joie…

Premièrement, la confesser contre l’évidence et contre les sentiments. L’Apôtre dit : Réjouissez-vous ! Nous répondrons : nous nous réjouissons et nous le dirons devant la Face du Très-Haut et devant la face du monde. J’ai connu des gens qui étaient écrasés par les souffrances et qui, cependant, semblables à des soldats ou de vrais héros, affirmaient : non, je me réjouis, se servant de cette joie comme d’un bâton pour fouetter la tristesse. Jésus-Christ proclame la joie. Seigneur, donne-nous la force de la proclamer avec Toi. Voici de quelle joie, de quelle douceur parle l’Épître.

 »Que votre douceur soit connue de tous », et le Christ : « Bienheureux les doux, ils hériteront la terre ». Ainsi, cette joie et cette douceur sont toutes deux une sorte de conquête du monde. David, l’ancêtre du Christ, gagna son royaume et devint l’icône de tous les rois parce qu’il était le doux David. L’attitude agressive d’un chrétien en face du monde doit être la douceur et la joie en toute circonstance. Voilà comment nous devons nous préparer. Si nous ne possédons pas cette joie, lorsque viendra la Noël spirituelle, nous serons endormis comme les pharisiens et les prêtres, comme les habitants de Jérusalem. Que cette joie réveille notre âme et nous rende vigilants avec les pasteurs des brebis, avec Marie et Joseph.

Je pense que ce commandement de Paul qui rejoint ici les Béatitudes, ces Béatitudes dans lesquelles le Christ nous propose le chemin de la victoire et de la lutte spirituelle, est tellement essentiel que je n’ajouterai rien d’autre aujourd’hui, mais je vous demanderai de prendre et de placer dans votre cœur l’appel du divin Paul : « Réjouissez-vous et que votre douceur soit connue de tous »

Amen !