Nuit de Noël

NUIT DE NOËL

Mgr Jean, évêque de Saint Denis
Décembre 1956

Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit.

Semblables à des enfants qui, devant une vitrine de joujoux, ne savent que choisir, tels sommes-nous, chrétiens, devant la Nuit de Noël et ses mystères.

Vous avez entendu l’homélie de Léon, pape de Rome, ce pape qui savait parler de l’incarnation du Christ comme personne ; vous avez entendu les chants, l’évangile, les paroles du psalmiste ; tout aujourd’hui est sermon et instruction !

En venant vers l’église, j’ai ressenti le désir de vous introduire dans ce que je pense être le plus merveilleux peut-être du Mystère de Noël et de la Révélation chrétienne. Que Dieu soit créateur, nous le savons ; que pour Dieu créer le monde n’est pas grand’chose ; nous le savons aussi. Mis que Dieu devienne homme pour nous, qu’Il S’abaisse, Lui l’Indéfinissable, est déjà un mystère immense, incompréhensible. Mais il y a autre chose que je veux confesser aujourd’hui et que saint Irénée de Lyon a tant aimé et si bien célébré. Le plus merveilleux, le plus étrange, le plus éblouissant de la révélation de Noël et du christianisme, c’est, mes amis, ce renouveau perpétuel dans lequel nous sommes et dans lequel nous vivons !

Écoutez-moi bien. Si Dieu est créateur du monde et que le monde chute, puis, avec l’incarnation et le rachat retourne à l’état paradisiaque ; si ce qui était sorti de Dieu revient à Dieu et ce qui était créé par Dieu remonte à son origine, cela est admirable mais apparaît pourtant comme un cercle vicieux, une répétition, un éternel retour : le corps à la terre, le divin au divin. S’il n’y avait réellement que Dieu-source et Dieu-fin, – certes, le monde dans le péché est joyeux d’être sauvé, l’âme séparée du contact divin est bienheureuse de le retrouver -, si ce n’était que cela : sortis de Dieu, nous revenons à Dieu, le Christ n’aurait pas apporté Son enseignement unique. Car tous les enseignements humains, en dehors de la Révélation, ont ce retour. L’un devient multiple, le multiple devient un, le pur dévient impur afin que 1’impur devienne pur.

Que nous apporte la révélation chrétienne proclamée à Noël ? Nous ne retournons pas seulement en Dieu, nous ne revenons pas seulement à la source, nous ne sommes pas seulement sauvés de l’enfer et de la mort, nous recevons quelque chose de neuf. Qu’est-ce donc ? C’est l’homme qui devient Mère de Dieu, l’humanité qui porte Dieu dans ses entrailles, l’être humain appelé à donner la réplique à Dieu qui devient comme lui pour que l’homme devienne dieu. Voyez la nouveauté, contemplez cette miséricorde inimaginable ! Déjà le mystère était grand : l’Insaisissable, l’Indéfinissable. le Dépassant tout S’incarnant pour notre salut. L’avez-vous « pensé » ce mystère ? Eh bien, un autre mystère brille à travers et découle de celui-là : par cette Vierge Marie qui est nous, cette femme Marie qui est nous tous présents dans l’univers, nous sommes devenus « Mère de Dieu » par elle, en elle. Et par elle, à la fin des temps, auprès de Dieu seront l’homme et le monde déifiés.

Voilà pourquoi aujourd’hui, je ne parlerai pas plus longuement ; la fête nous ravit et je ne puis qu’exalter aux côtés de notre Sauveur et Christ, Marie, Mère de Dieu.